Cette si jolie photo prise vers mes 14 ans, que je tiens au creux de ma main, me rappelle tant de souvenirs. Un paysage enneigé, la campagne qui s’étend sur des kilomètres. La petite maison construite en briques installée sur l’horizon, baignant les soirs d’été d’un soleil orange. Ma demi-sœur Olympe, serrant de tout son cœur notre père. Et la photo prise des mains de Brigitte. C’était il y a si longtemps mais cela semble si proche. Tout était bien à cette époque, surtout aux environs de mes 7 ans. Je me souviens encore du 26 Mars 2000. Je me suis levée tôt ce jour-là, extasiée à l’idée de voir repousser les fleurs du jardin, des hibiscus, marguerites, bleuets et encore beaucoup d’autres qui colorent le paysage de milles couleurs. Les arbres donner des fruits, hâte de pouvoir croquer à pleine dents dans les juteuses pommes, prunes ou poires. Après tout je n’avais pas énormément de préoccupations. Notre famille était pauvre, enfin, pauvre... Disons que nous n’avions pas les moyens de nous payer les conforts du quotidien. Je regardais rarement la télévision. Ce mot était si peu prononcé, je l’entendais seulement lors des fêtes ou lorsqu’on rendait visite à notre tante Maï. Cette journée si merveilleuse allait devenir, sans le savoir, la source de tous mes ennuis. Je me reposais sous un arbuste, quand ma belle-mère, Brigitte, vînt me voir. Auparavant je ne m’étais jamais demandée où se trouvait ma véritable mère et pourquoi était-elle partie comme ce que mon père m’avait raconté … Pour en revenir, Brigitte était méchante, enfin … Uniquement lorsqu’on était seuls. Hors de question de faire une crise devant mon père sous peine qu’il découvre qu’elle m’avait volé tout mon argent pendant plusieurs mois. Brigitte ne travaillait pas et passait son temps à me regarder travailler en se moquant de moi. C’était sa parole contre la mienne et mon père était trop amoureux. Celui-ci me donnait peu d’argent, à peine pour me payer à manger. A cause de ces vols je ne pouvais me payer qu’une miche de pain. J’étais jeune, naïve et inoffensive. J’ai énormément maigrit à cette époque, ce qui inquiétait mon père. Malgré cela, il mettait chaque jour de côté un peu d’argent, et se retenait de manger pour pouvoir m’offrir plus de nourriture. Il espérait que je m’en sorte dans la vie, que mon rêve de devenir quelqu’un de bien lorsque je serai plus grande devienne réalité. Une meilleure vie qu’il n’aura jamais. Il était bon et généreux. Brigitte nous annonça qu’elle était enceinte. Quelques mois plus tard, le 18 Octobre 2000, Olympe naquit. Elle était belle, de grands yeux bleus perçants et un regard fixe. Nous passâmes 5-6 ans de bonheur avant que tout s’effondre. Mon père mourut, décédé d’une crise cardiaque. Ce jour-là, j’avais 13 ans. Je n’étais pas encore majeure, alors Brigitte hérita de tout l’argent que mon père mit de côté, qu’elle usa pour payer des choses magnifiques à Olympe. Tandis que moi, je mourrais de faim dans un côté du jardin. Elle obtînt assez d’argent pour pouvoir enfin se payer du confort qu’elle utilisa pour elle et sa véritable fille. Je dormais jusqu’à mes 14 ans dans la chambre sous l’escalier en bois, Olympe, quant à elle, se retrouva dans la chambre la plus belle et somptueuse de la maison. A mes 14 ans, Brigitte me jeta dehors, m’obligeant à dormir et m’entretenir du jardin. Je me procurais la nourriture des arbres fruitiers, et je buvais lorsqu’il pleuvait. Ma sœur venait parfois me voir, car elle avait peur du jugement de Brigitte. J’étais comme une SDF, une recluse. Au fond, cette vie ne déplaisait pas à Olympe, elle n’était pas à ma place, ne connaissait pas ma souffrance. Les seules fois où je pouvais rentrer à l’intérieur c’était pour servir madame Brigitte. Si j’avais le malheur de rentrer sans autorisation, elle menaçait d’appeler la police et de me faire passer pour une SDF qui fouillait ses poubelles. L’idée était tentant, partout mais loin d’ici. Mais …. Non, j’aurais un casier. Et je voudrais faire de longues études.
J’ai vécu cette vie d’esclave jusqu’à mes 21 ans. L’été 2014 fut tragique. Comme d’habitude, je rentrais pour servir Brigitte, quand soudain, je l’ai vu morte sur le canapé. Elle saignait beaucoup et était transpercée d’un immense poignard. J’ai eu peur et je me suis enfuie. Olympe rentra et appela la police. Quand je sorti me cacher, je l’entendis hurler, pleurer, suppliant la mort pour qu’on ramène sa mère. Ne sachant pas où aller, je choisis de partir chez ma tante Maï. Quand je suis arrivée, elle m’accueillit à bras ouvert. Je lui expliquai tout. Quelques semaines plus tard, nous vîmes un témoignage dans un journal local. C’était Olympe. Elle croyait que je l’avais tuée. Elle supposait qu’après ses longues années d’esclavage je ne sois devenue folle. Depuis ce jour, elle me détestait, je ne l’ai plus revu depuis. Mes études continuèrent, la vie passa lentement, normalement. Lors de mes 22 ans, les policiers débarquèrent chez tante Maï. Ils m’accusèrent d’un crime que je n’avais pas commis. Ils m’enfermèrent, pour une peine de 6 ans. Quelle injustice… De jour en jour, je croupissais en prison. Bien décidée que sortie d’ici, je résoudrais les problèmes d’injustices en continuant mes études. Le 8 Juin 2017, 2 ans plus tard, à mes 24 ans, Tante Maï me fit sortir de prison, m’aida à m’échapper. Elle me prit par le bras m’emmenant loin. Oui car, à partir de ce moment, j’étais vue comme une prisonnière échappée de prison, un danger pour la population, je serai recherchée, pourchassée à travers les pays. Tante Maï me conduit jusqu’à un grand portail, m’expliquai tout pour ma vraie mère, qu’elle était depuis longtemps une sorte de gardienne qui veillait sur ma sécurité et qu’il était temps que je sache où je devais continuer mon avenir. Elle m’invita à passer le portail, et ma vie changea, à jamais.