Un gymnase, Seattle, un jour d'octobre 2000

Je respire profondément. Pour me calmer, je joue avec la flexibilité de mon épée. Allez ! ça va bien se passer ! Je vais le déchirer. Du moins, c'est ce que je m'efforçais de me dire. Prudemment, je risque un regard vers la zone de combat vide qui m'attends puis le publique venu en nombre. Mon père, comme toujours, s'est assis le plus haut possible, dans un coin sous un épais manteau à capuche pour couvrir sa tête. Tiens le coup ! Si il a fait l'effort de venir je dois pas le décevoir. Je le comprenais, se montrer ainsi quand on a une telle apparence.
Peu de temps avant ma naissance, il avait été appelé pour un incendie majeur dans un immeuble d'affaire. Son travail de pompier exigeait qu'il aille au dernier étage pour secourir des employés prisonniers des flammes. Lorsque le bâtiment s'effondra il fut recouvert par des débris ce qui lui sauva la vie au prix de graves brûlures sur l'intégralité de son corps. Disons simplement que son apparence était... surprenante.
C'est lorsque je travaillais seul mes mouvements dans les vestiaires qu'elle choisis ce moment pour venir me parler. J'apprendrais plus tard que c'était très rare mais aujourd'hui je ne me sens en aucun cas honoré de son geste.
Aussi étonnant que cela puisse paraître je n'ai pas beaucoup de souvenir de cette rencontre avec ma mère tant sa voix dans ma tête a remplacé cette première image d'elle. Depuis ce jour elle ne me quitta plus. Je voyais en elle une nouvelle force en moi que je pouvais exploiter pour devenir quelqu'un de meilleur sur tous les plans. C'était la première leçon qu'elle m'appris lorsque je fut, à l'issue de ma rencontre d'escrime, qualifié pour le concours national.
Je fus envoyé à la Colonie des Sang-Mêlés comme la plupart des personnes de mon genre et appris tout, en particulier son nom qui sonne aujourd'hui pour moi comme une insulte : Algea.
Comment suis-je arrivé à haïr à ce point ma propre mère vous demandez-vous surement ? Ces voix... Elles m'ont montré une face bien sombre de l'Humanité : la torture. Depuis ce jour j'essaye d'effacer ces images, en vain... Poussé par la colère, j'étais à deux doigts d'exaucer son terrible dessin lorsque ma raison m'a ramené à moi. Ce jour là, ma foi envers le dieux s'est envolé et je me suis senti libéré pour la première fois depuis notre rencontre, de son étreinte malfaisante comme la bien-être que l'on ressens après une longue et éprouvante douleur. Ce fut la deuxième leçon qu'elle m'appris et la dernière à e jour : on ne peux jamais avoir confiance en un dieu.
Depuis ce jour, je me suis juré de l'éliminer pour que son horrible contrôle sur l'Humanité elle-même cesse. Et c'est 10 ans après avoir quitté la colo, dans probablement l'endroit le plus inattendu possible que j'allais trouver un moyen de mettre fin à tout ceci...