Les dieux n’ont pas tous la même notion de leur statut. Certains se croient tout puissant et indestructibles. D’autres pensent que nous devrions nous joindre aux humains et les aider dans leurs quêtes. Beaucoup font des bébés à demi humain. Moi, je pense que je suis puissante. Je suis une déesse, après tout. Et je ne voyais pas en quoi me mêler à un humain pouvait être agréable. Pendant très très longtemps, je les ai regardés de haut. Oh, oui, parfois, j’aimais descendre sur terre et en séduire un ou deux. Mais au grand jamais je ne les auraient laissé me toucher, à l’époque. Et puis, j’avais mieux à faire. Comme de transmettre les bonnes nouvelles et créer des arc-en-ciel fabuleux en attendant de pouvoir parfumer Héra à ses retours des enfers.

Ce ne fut qu’après plusieurs centaines d’années, alors que tous les dieux avait des enfants, que je me demandais ce qui les intéressait autant. J’interrogeais donc ma maîtresse, Héra. Si quelqu’un pouvait répondre à mes interrogations, c’était bien elle! Mais la seule réponse que j’obtins, fut que je ne pourrais pas comprendre ce que l’on ressentait après avoir enfanté si je ne l’essayait pas par moi-même. Soit. Mon premier enfant serait donc un test. Et si je n’aimais pas, eh bien, je n’avais qu’à ne pas m’occuper de lui, comme beaucoup de déités de ma connaissance.

J’eu donc mon premier enfant. Les dieux seuls savent combien les émotions que ressentis pour cette petite pousse de moi furent intense. C’était, en quelque sorte, mon héritier, moi qui n’avait pas d’enfant chez les dieux. Les règles disaient que nous ne pouvions pas nous occuper de nos enfants terrestres… mais je su que ce me serait impossible. Je ne pouvais pas l’ignorer. Ni lui, mon premier, ni tous ceux que j’aurais ensuite, parce que oui, il y en aurait plus! Ainsi donc, je devins une mère poule, gardant jalousement mes enfants du malheur. Et gare à ceux qui osaient tenter de leur faire du mal. Ils se faisaient botter les fesses par une déesse en furie. Malheureusement, je ne pouvais pas me dédoubler, et donc, je ne pouvais pas faire éviter à tous mes enfants les malheurs et les problèmes qui les guettaient.

J’étais tellement occupée, entre mes enfants mortels et mes devoirs de déesse que jamais ne me passa par la tête l’idée de prendre un amant ou un mari parmi les dieux. De toute façon, trouver un dieu qui me comblerait serait difficile. J’étais jolie et lumineuse, sans compter que j’occupais un poste près d’Héra. C’est un jour, sur terre, que mon opinion changea. Quand mon enfant rencontra l’enfant d’Hermès, qui veillait visiblement, lui aussi, sur sa progéniture. Je ne m’étais pas vraiment intéressée à lui avant de me rendre compte de cela. Un jour, en le croisant, je pu aussi me rendre compte qu’il n’était laid… et que le messager des dieux ferait un parfait compagnon pour moi… à tout le moins, pour une petite aventure. Je me mis donc en tête de le séduire.

À mon propre étonnement, ce ne fut pas si dur. Malheureusement pour moi, par le même coup, il réussit à me séduire aussi, bien que je réussit à garder ce fait secret. J’aime nos petits jeux de séduction, j’aime le voir tenter de m’avoir. Du coup, pas question de lui laisser savoir que je l’aime bien.

Et ce petit jeu dure depuis maintenant bien longtemps. Tout comme mes premiers enfants sont morts il y a bien longtemps. Le deuil, je m’en rendis compte rapidement, est une épreuve dure, quand on aime l’être qui meurt. Cela n’arrive pas, ou presque, parmi les dieux. Et ressentir cette peine et cette douleur me fire un peu perdre la tête. Depuis, je pleure souvent sans raison apparente. En réalité, c’est que mon amour pour ce qui vit, comme mes enfants, est trop grand. La peur de les perdre me fait ressentir la douleur que j’ai ressentit à la perte de mes premiers. Je crois que les hommes nomment mon état de l’anxiété.