(+) la fille de la mer est née des vagues et de l'écume. c'est un jour glacial de janvier que les habitants de la petite ile de sammos ont découvert l'enfant, dormant paisiblement contre le sable blanc. seule, sans l'ombre d'un parent, incapable même de parler. rescapée d'un naufrage, enfant abandonnée ? encore aujourd'hui nul ne le sait.

(+) On dit qu'il faut tout un village pour éduquer un enfant. appelée nausicaa - brûleuse de navire, un nom qui lui sied si bien - la gamine n'as pas tardé a créer des problèmes au sein de la si paisible communauté. tumultueuse, orageuse, un ouragan de force cinq était lâché sur sammos. si elle ne prononçait pas un mot, elle hurlait comme une possédée dès qu'on l'approchait. famille en famille, les habitants ont accueillis tour à tour l'étrange enfant venue de la méditerranée mais tous ont baissé les bras lorsque les premières crises commençaient. tous sauf stavros. il a fallu d'un seul regard du vieux pêcheur pour que le hurlement de nausicaa se fige dans sa gorge. et c'en était décidé, elle irait chez le galanis. elle s'était trouvée une famille.

(+) il était fou d'elle. oh, il ne le montrait pas mais le vieux grec s'était pris d'une affection sans bornes pour la petite sauvageonne. pêcheur qui ne vivait que des bienfaits de la mer, il la gâtait pourtant comme si il avait été roi. elle était sa princesse, son monde entier. Il l’amenait souvent en mer, l’emmenait pécher avec lui, lui qui était pourtant reconnu pour son caractère taciturne et sa froideur, fondait pour cette gamine qui avait su faire chavirer son cœur.

(+)elle avait découvert ses pouvoirs sur l'eau très jeune, courant après d'autres enfants du village, ses pas l'avait mené jusqu'a la plage. elle était fascinée par l'infinie étendue d'eau. elle posa un pied puis un autre, et sans s'en rendre compte marcha sur l'eau. Et tomba quelques secondes après l'avoir réalisé. elle se créait tout un univers de personnages faits d'eau dès qu'elle prenait un bain. en comprenant le pouvoir que son don lui apportait vis-à-vis des autres, elle n'a pas tardé à vite devenir une experte en sa maîtrise.

(+) stavros avait tout de suite compris. elle était comme lui. le fils de zéphyr avait pourtant essayé de fuir le monde mythologique, recommencer une nouvelle vie loin des tourments divins. oublier les horreurs qu'il avait vécu. c’était pour cela qu’il avait choisi cette île éloignée de tout, ou les créatures n’apparaissaient jamais. Si il ignorait qui était son parent divin, il lui appris néanmoins tout ce qu'il savait. il lui appris la naissance du monde, les dieux qui y régnaient en maîtres, mais il lui appris surtout les dangers tapis dans l'ombre, les monstres qui rodaient, prêt à la dévorer. il espérait ainsi la garder à tout jamais près de lui.

(+) mais ses récits terrifiants eurent l’effet inverse sur la jeune fille. nourrie par  ces histoires de légendes, elle rêvait de terrasser des monstres et d’épopées épiques tel héraclès ou ulysse. elle rêvait de quitter cette île, bien trop petite pour ses ambitions démesurées. elle bouillonnait intérieurement, incapable de tenir en place. une frustration dévorante qui la poussait à tester toujours plus loin ses limites et celles de son entourage. cigarettes, alcool, sexe… nausicaa était en permanence à la recherche de quoi que ce soit qui puisse tromper son ennui. une spirale infernale commença alors, précipitant la fille de la mer dans les abysses.

(+) ce fut le surf qui la sauva. sa découverte de ce sport fut d’une banalité affligeante : elle l’avait vu à la télévision et n’avait pas pu détourner le regard des ces gens qui dansaient avec les vagues. sans surprise, elle avait raflé tous les prix des compétitions locales, favorisée par son don, qui lui permettait de ne jamais échouer dans ses figures compliquées. bientôt, elle fut reconnue dans toute la grèce puis dans toute l’europe. et le cauchemar de Stavros arriva. elle était l’étoile montante du surf, il fallait qu’elle fasse ses preuves ailleurs, qu’elle découvre le monde.

(+)  c’est sans un regard en arrière qu’elle quitta sammos. Certes, elle était triste de quitter son père adoptif mais la tristesse fut vite remplacée par l’excitation de réaliser ce qu’elle avait toujours rêvé. une nouvelle vie s’ouvrait à elle, faites de voyages, de trophées, de gloire et de succès. elle faisait le tour du monde, récoltant les palmes de la victoire à chaque fois qu'elle montait sur sa planche. elle ne faisait plus qu'un avec la mer et ce fut d'ailleurs après avoir remporté (encore) une compétition qu'elle rencontra pour la première fois sa mère, la déesse amphitrite. celle-ci lui révéla ce qu'elle savait déjà : elle était la princesse de l'océan, capable de contrôler vents et marées. la grandeur comme destinée.

(+) il a bien fallut que ce tourbillon s’arrête. nausicaa, alors agée de seize ans, devait rentrer dans son ile, revoir son père. le village entier était venu accueillir l'enfant prodige, et pourtant quelqu’un manquait à l'appel. stavros était mort quelques jours auparavant, emporté par le chagrin. le monde de nausicaa s'écroula. c'était de sa faute. elle ne s'était même plus souciée du viel homme, à qui elle devait tout. elle se mit à haïr le surf mais surtout elle même pour s’être laissée emportée par son hybris.

(+) cette fois-ci ce ne fut pas le surf qui la sauva de sa déchéance mais les études. elle s'y était jetée corps et âme, travaillant jour et nuit pour rattraper son immense retard. mission accomplie. elle fut diplomée d'océanologie et partit encore une fois loin de stammos mais cette fois-ci, c'était pour fuir ses mauvais souvenirs. direction new-york.