J'avais quitté le studio de photographie plus tôt que d'habitude. C'était pas dans mes habitudes, mais j'en avais marre de rester mes journées enfermées avec pour seule compagnie un flash aveuglant et des mannequins superficielles lors de ma saison préféré. Je préférais me faire bouffer par des Lestrygons. J'avais donc sifflé et attendus patiemment que le taxi des vieilles sorcières aveugles me prennent sur la route. J'avais pile dans ma poche ce qu'il me fallait pour la petite course que représentait New-York à la colonie et au pire, avec le salaire que je gagnais, ce n'était pas un problème si elle m'envoyait valser en passant par la Floride ces vipères informes. Malheureusement, ça ne serait pas la première fois qu'elles me feraient le coup, voilà pourquoi je ne pouvais pas les voir. Je fus accueillis comme d'habitude par les vieilles folles. " Alors, fils de Némésis, ça marche bien le mannequinat ? Enyo rends moi l'œil c'est moi qui conduit ! " Je leur lançais un regard exaspéré dans le rétroviseur, sachant qu'elles n'allaient surement pas pouvoir le remarquer, et tint le silence dans la voiture, enfin, en oubliant les cris des sorcières qui se disputaient les parties du corps qu'elles pouvaient sauvagement échanger. Le trajet fut particulièrement long, pour le coups. Les deux minutes passèrent lentement et me donnèrent une nausée incroyable. J'étais impatient de redescendre de cette vieille bagnole dépravée qui servait de taxi New-Yorkais olympien. Lorsque qu'on atteignit la colline, mes yeux s'illuminèrent. Elle me déposèrent devant la barrière et je leur tendis les 30 drachmes que je leur devais. Elle ne se firent pas prier et disparurent à travers la forêt en à peine quelques secondes. Les flocons de neige recouvraient la colline immaculée et moi, je vagabondais parmi les demi-dieux présents, c'est à dire un nombre plutôt réduit en milieu de semaine. On pouvait voir des restes de bonhomme de neige fait par des gosses en manque de normalité, on pouvait aussi voir que ces sculptures fondantes portaient des plastrons, des vis et même des haches ou épées en tout genre. On aurait pu croire que ce n'était qu'une colonie de vacances, pour des adolescents qui ne pouvaient pas forcément voyager, mais nous et moi en premier étions ramenés à la réalité rapidement. Cet endroit était tout sauf un camp de vacances. Seulement, j'aimais bien cette vision de destruction. C'était peut-être le guerrier, épéiste surdouée qui parlait en moi, ou bien le faites que chaque combat nous réunissait et nous permettait de créer justice autour de notre monde, notre univers si important, notre petite coquille. De plus, certains s'en sortait plutôt bien. Dont moi. Et bien d'autres. J'en étais même sur, la colonie n'était certainement pas la source de tous nos problèmes. J'avais les miens, mes problèmes, tel que Joaquim et ses menaces annuelles mais toujours aussi flippantes, mes devoirs en tant que fils de Némésis et bien d'autres. D'ailleurs, l'un de mes tourments des derniers mois filait à travers les bâtiments. C'était la blondinette rayonnante de joie de vivre que j'aperçus au loin. Il y en avait beaucoup des blondes chez les sangs-mêlés, mais pas comme elle. La plupart d'entre elle étaient filles des moissons ou bien celles des colombes blanches, pas elle. J'avais l'impression que cela faisait une éternité que je n'avais pas vue cette fille du soleil. Rectification, cela faisait une éternité que je ne l'avais pas vu. Entre le mannequinat, les jeux et quelques problèmes survenus entre nous deux, c'était bien normal. D'ailleurs, je n'étais pas sur de connaître la véritable raison de cet éloignement. J'avais quelques soupçons, bien entendu, qui, au plus grand des hasard, impliquait Cassandre, mais je ne pensais pas que la jalousie soit le fin mot de l'histoire. Je décidais donc de la suivre, pour la surprendre. J'avançais rapidement afin de la rattraper, mais sans qu'elle puisse se rendre compte de ma présence, après tout, un mec de 1m88 ça se voit à des kilomètres. Elle se dirigeai surement vers l'infirmerie mais ayant du temps libre, je voulais la coincer avant, pour parler, ce qu'elle devait faire pourrait attendre. Après tout, c'était une amie qui comptait beaucoup à mes yeux et c'était rare : elle était spéciale et donc, je devais la garder mes côtés. Elle s'arrêta au milieu de la plaine et alors que j'étais à quelques mètres, j'accélérais vite avant d'arriver derrière la jeune fille au cheveux dorées et poser mes mains sur ses épaules frêles, murmurant à son oreille. " Bouh. "

J'avais toujours la nausée à cause de ce foutu Char de la Damnation et les souvenirs qui étaient remontés à la surface dû aux simples mots prononcé à son oreille n'arrangeait en rien cette envie de gerber mes trippes. Cassandre, Sunshine et Joshua. Cette histoire avait fait le tour de la colonie. J'avais alors vingt années. Tout le monde était au courant de ce drame romantique ridicule, sauf moi, enfin, je ne comprenais pas tout et je me foutais un peu des rumeurs qui circulaient un peu partout. Il y avait des choses beaucoup plus importantes autour de nous, comme les monstres, calmer les dieux, s'entraîner. Seulement, là, je regrettais de ne pas m'y être un peu plus intéressé. J'aurais pu cerner le problème qui se dressait devant moi. De plus, j'avais activé mon pouvoir, sans y faire grandement attention, et je ne fus pas vraiment surpris de voir s'afficher sur le front de la blondinette le prénom de Cassandre. Il était légèrement flou, pas aussi net que les autres que j'avais pu observer par moment, ce qui me faisait très bien comprendre que ce n'était que de la haine superflue, mais aussi qu'elle pensait à elle à l'instant. Ma mâchoire se serra d'instinct, comme à chaque fois où je suis ressens de la frustration. Pour en revenir à mes connaissances sur cette passionnante histoire où j'étais l'un des personnages principaux, je savais que Cassandre était sortie avec moi pour une raison suspecte qui avait particulièrement énervée la fille du soleil. Seulement, je savais aussi que la fille d'Aphrodite m'avait vraiment aimé, peut-être pas de tout son cœur, mais quand même, une simple amourette comme j'en ai vécu d'autres. J'étais aussi au courant d'une dispute qui avait éclaté entre les deux jeunes filles, à laquelle je ne m'étais pas mêlé, sachant pertinemment que ce n'était pas mes affaires. Je regrettais à présent de ne pas savoir ce qui s'était réellement produit. C'était il y a trop longtemps. Il fallait rattraper le temps perdu. Même si je ne savais pas vraiment pourquoi c'était si important. Peut-être que ma mère m'influençait ? Non, c'était pas son genre. Elle m'aurait envoyé un de ses fameux fortunes cookies en me disant de me débrouiller par moi-même. Par contre, une autre déesse devait actuellement s'en mordre les doigts à coup sûr.

Sa chevelure qui encadrait ses yeux bleus brillait sous le soleil hivernal. Elle se tourna vers moi lentement et n'osa pas fixer mes yeux. Je ricanais intérieurement de la voir aussi timide, même si j'étais tout aussi envoutée par elle. Ce n'était d'ailleurs pas normal. "Ah... Salut Joshua... Je... " J'avais toujours ma main sur son épaule, touchant surement contre son gré le manteau qu'elle avait enfilé. Ses joues et son nez étaient rosis par le froid, ses lèvres devinrent bleues de la même manière. Elle ne devait pas aimer l'hiver, connaissant son paternel qui était plutôt chaud bouillant comme divinité. " Faut que j'aille à l'infirmerie. A plus tard ! " Sunshine s'écarta rapidement de moi et partit en courant vers la Grande Maison. Je devais lui parler, il ne fallait pas qu'elle me file entre les doigts. Cela faisait trop longtemps que je n'avais pas parlé à cette amie qui laissait un trou dans ma vie, enfin, rien de bien méchant. Elle me manquait et j'avais été beaucoup trop passif lorsqu'elle essayait de s'enfuir. Pas cette fois. Je lui attrapais l'avant bras et l'empêchait de faire un pas de plus. " Hey, je sais que tu es occupé, mais j'aimerais beaucoup avoir une discussion avec toi ... Maintenant. " Je lui fis mon regard implorant, ce qui veut dire neutre et j'attendis, plongeant mes yeux dans ses iris si belles.

Je continuais de la fixer et étonnement, j'avais du mal à m'en défaire. Ce bleu enchanteur qui donnait l'impression d'illuminer le blanc, soyeux de la neige. Je pensais à n'importe quoi. Mon esprit était complètement brouillé. Ce n'était pas normal. Je n'avais jamais ressenti ça. J'essayais tant bien de mal à reprendre mes esprits, redevenir simple, sans rien éprouver, extrêmement passif mais j'avais du mal. Oui, je ne me sentais faible devant cette couleur, devant ses lèvres bleutés, ses joues rosies. Il fallait vraiment que je reprenne mes esprits et Sunshine, involontairement, m'aida un peu lorsque qu'elle éternua. C'était bruyant, singulier, rien d'extraordinaire, mais réjouissant, mélodieux et mignon, à son image. J perdais la boule. C'était sûr, le mal des transports étaient décidément nocifs. a moins que ce ne soit juste les pestes qu'ils le soient, ce qui serait beaucoup plus plausibles. La jeune fille se décida enfin à me répondre et heureusement. " Ecoute Joshua, je ne sais pas de quoi tu veux me parler, mais j'ai pas que ça à faire, lâche-moi. " Ces mots eurent sur moi l'effet d'une gifle. Pas si violente que cela, loin de là, mais assez pour me faire reculer d'un pas en arrière. Je manquais de peu de glisser sur une plaque de verglas, ce qui aurait été le comble. Ses yeux laissaient à présent échapper des perles d'eau. Alors que j'allais lui répondre, sur un ton surpris, ou neutre si j'arrivais à reprendre le contrôle, elle reprit la parole avant de s'en aller, toujours dans la direction de cette foutu infirmerie. " Et puis je crois qu'on a pas grand chose à se dire. Faut dire qu'on s'est pas beaucoup parlé depuis toutes ces années ... " Je restais bloqué pendant quelques secondes, la regardant s'éloigner. Je ne savais pas comment réagir. devais-je lui courir après, est-ce qu'il serait juste de ma part de la laisser s'enfuir, une fois de plus, sans avoir pu parler ? J'aurais aimé avoir un signe quelconque de ma mère. Un fortune cookie tombant du ciel aurait pu me convenir et aurait retenu mon attention. Mais non, j'étais bloqué.

Je pris ma décision rapidement (c'est ça ouais), commençant à courir. Je détestais ne rien comprendre mais ce que je détestais le plus ici était de la voir partir encore une fois. Arriver à son niveau, j'attrapais son avant-bras, avec plus de force qu'avant et décider à ne pas la lâcher. Le contact sur sa peau me fit frémir mais je n'y prêtais pas plus attention. Ses yeux m'hypnotisaient, contre mon gré et ça m'était insupportable. Je détestais cette sensation de faiblesse, cette chaleur, mais je n'arrivais pas à m'en défaire. Une des raisons pour lesquelles je sentais mes nerfs chauffer, mon pouls s'accélérer et ma mâchoire se contracter. " STOP. C'est quoi ça ? Franchement ? C'est peut-être pour ça qu'on devrait parler n'est-ce pas ? Pour rattraper le temps perdu ? Merde. Je pense que les infirmières peuvent t'attendre un peu non ? " J'y étais peut-être allé un peu fort, sur mon ton, mais je n'arrivais pas à me contrôler. Tout se chamboulait, ce n'était pas bon. Il fallait que je reprenne mon calme, que je me concentre et redevienne invulnérable, passif, neutre, comme je l'étais habituellement. Tout en continuant de retenir son bras d'une possible tentative de fuite de la part de la fille d'Apollon à la longue chevelure dorée et étincelante, je fermais les yeux pour me reprendre. " Ecoutes. Il faut vraiment qu'on discute. Je ne te lâcherais pas tant qu'on aura pas parler, comme avant. " J'essayais de prendre un air sérieux mais en vain. J'étais sur que mes yeux reflétaient ma faiblesse de l'instant. La faiblesse que j'avais longtemps planquer au fond de mon cœur, depuis mon départ à Phœnix, depuis tout.

Spoiler:

Je n’avais aucune réputation auprès des femmes. Après tout, j’étais discret, toujours planqué quelque part et mes relations amoureuses étaient des plus platoniques. C’est pourquoi elles étaient courtes, la plupart du temps avec des filles d’Aphrodite, sans grands intérêts sentimentales. Cette vie m’allait très bien. Je n’avais aucune envie d’une vie future avec deux gosses turbulents, une femme qui restait à la maison et moi, expert-comptable, rentrant chaque soir dans mon cocon. Cette vie n’était pas faite pour moi. Jamais je ne pourrais avoir autant de responsabilité. Joaquim m’en avait dégouté. Il m’avait rendu faible sur la vie de famille et jamais je ne voulais que ça se reproduise. Après, dire que je n’étais pas reconnu était un mensonge. J’étais dans les plus vieux de la colonie, niveau âge et donc maturité (même si cette dernière reste à vérifier de temps en temps). On me connaissait pour des combats remportés avec force et stratégie, pour mon jeu d’épée impressionnant et mon sens de la justice développé.  De temps en temps, je faisais l’imbécile, cognant sur des imbéciles qui l’avaient amplement mérité, ce qui faisait le tour de la colonie, remontant à l’oreille de notre cher Chiron, mais ça s’arrêtait là. De toute façon, je n’étais pas habitué à l’importance de mes sentiments à l’époque. J’allais atteindre la vingtaine certes mais j’étais déjà, en quelque sorte, l’homme passif que je suis aujourd’hui. Et je m’intéressais, comme tous les jeunes de nos jours aux relations passionnées que nous pouvions avoir avec certaines pensionnaires du camp des sang-mêlé. J’avais d’ailleurs perdu ma virginité avec l’une d’elle. Mais ce passage ne vous concerne aucunement. Alors, lorsque Cassandre Avery, la fille la plus jolie de la colonie avait avoué éprouver des sentiments à mon égard, je n’avais pas réfléchi, enfin, ouais, pas trop quoi, et je l’avais embrassé passionnément. Au fur et à mesure des jours, je ressentais quelque chose qui fumait en moi, comme une chaleur dans la poitrine à chaque fois que je croisais ses yeux bleus. Puis, ses sentiments naissants à son égard ont pris une tournure inattendue. Je ne la voyais pas comme une petite amie, non. Elle ressemblait plus à ce que je pourrais qualifier d’amie proche, quelqu’un avec qui vous vous sentez bien. Le malaise s’est installé et je voyais bien que c’était la même chose pour elle. Alors, nous avons rompu d’un commun d’accord, gardant quand même nos distances aujourd’hui. La blondinette, elle, était juste une amie que je devais protéger et puis du jour au lendemain elle ne m'avait plus adressée la parole. Elle fuyait ma présence et moi aussi, ne sachant pas pourquoi. C'était mon instinct et je le suivais sans me poser de questions, ignorant le vide qui se formait. Tout était dit, jusqu'à aujourd'hui.

Je tenais Sunshine par le poignet et la fixait intensément. Ses yeux devenus froids m’énervaient. Ils me mettaient hors de moi. Je détestais ça. Je détestais utiliser la force. Je détestais m’énerver contre elle. Et pourtant, mes émotions s’entre choquait, explosant en moi ce qui m’empêchait de me contrôler. Etait-ce que Joaquim ressentait avant de me frapper ? J’espérais le contraire. Je ne voulais pas la blesser. Elle était fragile, pure. Elle ne méritait pas ça.  Enfin, c’est ce que je pensais avant que son pied écrase avec violence le mien et que sa main, si froide, tremblante, s’écrase contre ma joue. Mon corps se figea. Je ne comprenais pas ce qui se passait. C’était comme si je percutais une voiture en plein fouet. Ou bien, plusieurs fils électriques qui se connectaient entre eux, provoquant une décharge violente dans la totalité de mon corps. En quelques secondes, j’avais tout perdu : toutes mes émotions s’étaient envolées, laissant seulement une douleur vive sur mon pied et ma joue. Je ne bougeais toujours pas. J’avais mal, vraiment mal, et pourtant j’avais déjà été eu des maux plus puissants. C’était incompréhensible, une fois de plus. J'avais l'impression que les secondes étaient de longues heures, je ne percevais que le blanc de la neige et la chevelure blonde de mon agresseur, assise sur la couverture de glace qui recouvrait le sol. J'entendais ses pleurs, je la voyais là, les larmes ruisselant sur ses joues et je n'arrivais toujours pas à me mouvoir, toujours sous l'emprise du choc. Elle leva fébrilement la tête, me transperçant une fois de plus avant de se déchaîner. " Je... Je suis... Bah vas-y parle qu'est-ce que tu attends ?! Parle-moi de Cassandre, parle-moi de tout l'amour que tu portais pour elle jusqu'à qu'elle te laisse tomber comme une vieille chaussette, parle-moi de la façon dont tu m'as ignoré pendant toutes ces années ! Vas-y lâche toi ! " Elle s'arrêta quelques secondes, juste assez pour que je puisse reprendre mon souffle. J'avais retenu pas respiration pour une raison inconnue et encore une fois, mon cœur se stoppa nette lorsqu'elle reprit la parole, la voix brisée et les larmes coulant à flots. " Dis-moi aussi comment tu as fait pour ignorer les sentiments que j'avais pour toi ... ". C'était tout ce qu'il me fallait pour reprendre conscience de ce qui se passait autour de moi. Je posai ma main sur ma joue, l'endroit qu'elle avait frappé de sa main et palpa la marque rouge. Mes doigts froids atténuèrent la douleur physique mais j'étais toujours blessé et plus remonté que jamais. Oui, et cette fois-ci, j'étais sur que je n'arriverais pas à me contrôler. De toute façon, j'avais perdu le contrôle depuis longtemps. Depuis que je lui avais adressé la parole même. Alors, je me laissais aller. " Tu crois vraiment que Cassandre n'éprouvait rien à mon égard ? On était des gamins certes, mais merde, on a quand même ressenti quelque chose ! Et crois-tu vraiment que je suis assez naïf pour me faire jeter de la sorte ?! On a mis fin à notre relation ! TOUS LES DEUX. Parce que je ne ressentais que de l'amitié pour elle. " Mes poings se serrèrent tel un automatisme. Je pris de grandes inspirations, essayant de calmer cette rage qui brûlait dans le creux de l'estomac et qui me faisait mal, oh putain oui elle me faisait mal cette garce, mais en même temps, je me disais que je ressentais quelque chose et que ce n'était pas plus mal. Cela faisait tellement longtemps que je ne m'étais pas senti comme tel. Peut-être parce que je savais qu'elle avait ressenti quelque chose à mon égard ? Ou bien parce que j'étais juste pas dans mon état normal ? " Tes sentiments je n'en savais rien bordel ! Je ne pouvais pas les ignorer vu que je n'en connaissais pas l'existence ! Crois-tu vraiment que j'allais le deviner ? Non. Parce que j'avais les miens à décrypter ! Tu n'étais qu'une gamine et moi un imbécile et je le suis toujours ! Oui, on est tous des imbéciles ! " Je pris ma tête dans mes mains, me massant les tempes. Il fallait vraiment que je reste calme. Mais je n'y arrivais pas. Non, parce que la voir dans cette état était insupportable. Je me sentais à présent coupable de ses larmes, en colère pour ce qu'elle me faisait dire et complètement perdu. J'allais devoir être interné dans un asile si ça continuait. " Putain tu te rends donc pas compte que tu es en train de me rendre fou ?! Regardes moi ! Je ne suis pas dans mon état normal et je ne comprends pas ce qu'il m'arrive ... " Ouais, j'étais complètement fou. Fou de de colère et fou d'elle.

Dans une autre vie, je savais que j’aurais été capable de déchiffrer ce que je ressentais, de ne pas voir que tout est noir, surtout quelques années après ce sombre jour. A cette époque, comme je l’avais bien dit à Sunshine quelques instants plus tôt, je n’étais qu’un imbécile. Je restais froid, ressentant que de la haine, de la peur, j’étais terrorisé à l’idée de mourir. Bien sûr, j’avais réussi à m’intégrer dans cette tendre colonie mais cela ne suffisait pas. Il me fallait une étincelle, quelque chose qui pouvait me raccrocher à la vie, quelque chose qui pouvait me faire oublier le courroux de Joaquim. La blondinette n’était qu’une enfant mais elle illuminait la colline par son sourire et ses jolies mèches ondulés au couleur du soleil. Elle réchauffait les cœurs de chaque adolescent, de bungalows différents. Je ne m’en étais pas, bien sûr, rendu compte, après tout je n’étais et je suis toujours un imbécile mais au fur et à mesure, je m’ouvrais aux autres. Elle était venue me parler et ça m’avait suffi. On était ami. Puis, par la suite, les hormones passèrent, enfin, s’intensifièrent, et je commençais à faire encore plus l’idiot que d’habitude. Je ne pourrais pas qualifier mon amourette avec Cassandre de superflue, loin de là, mais je suis sûr d’une chose, je ressentais beaucoup plus de choses lorsque je fixais les yeux bleus de Sunshine.  C’était aujourd’hui évident que Cupidon avait planté sa flèche dans mon cœur, même si je ne voulais pas que cela arrive. Après tout, j’étais un enfoiré, encore une fois, je ne méritais pas le diamant, soyeux, taillé, exposé aux rayons du soleil qu’était la blondinette. Je le savais, que j’avais été victime de violentes pulsions et tant que je n’avais pas fait taire celle-ci, je n’étais pas prêt à rentrer dans une relation sérieuse ? Sunshine restait innocente, fragile. Pourrait-elle supporter mon caractère passif et agressif lorsque cette fameuse date approchait à grands pas ?

D’un autre côté, j’avais besoin d’elle à mes côtés. Maintenant que j’avais subtilement déclaré ma flamme, je ne pouvais pas revenir en arrière et sortir une phrase toute faite. "  Je suis désolé, en faites, oublies tout. " je n’arriverais jamais à formuler ces mots et mon corps se révulserait de dégoût contre moi-même. Je l’avais suffisamment blessé dans le passé et le présent, il fallait y mettre un terme.  " Tais-toi ! Tu ne sais rien, tu ne comprends rien. Tu n'as pas souffert comme moi j'ai souffert. Ta petite amourette avec Cassandre m'a affecté. Si tu avais vraiment des sentiments à décrypter, tu aurais compris plus tôt que... " Je ne bougeais plus, fixant mes pieds, les poings serrés, j’attendais la suite de ma sentence. " Tu es en train de dire que tu es amoureux de moi... Ce n’est pas vrai... Tu mens... " Pourquoi mentirais-je ? Je ne pouvais même pas me mentir à moi-même alors à elle ? C’était impossible. Elle s’approchait encore un peu plus de moi avant de poser violemment sa main sur mon torse. Je la sentais trembler, à moins que ce ne soit moi, qui tremblais à cause du léger contact ? " Prouve-le-moi. Oui, prouve-moi que je te rends fou, prouve-moi que tu as des sentiments à mon égard, prouve-moi que tu m'aimes. " Elle me regarda une dernière fois dans les yeux avant de partir en courant. Pourquoi fallait-elle qu’elle parte encore une fois ? Pourquoi fallait-il que je reste sur place, immobile ? Je voulais lui courir après mais était-ce la bonne chose à faire ? Après tout, elle le détestait, mais elle voulait aussi une preuve. N’était-ce pas suffisant, de la part d’un Joshua cinglé, que des mots significatifs ? A ce que je pouvais voir, non. Je commençais à avoir mal aux mains, tellement mes doigts se contractaient contre ma chair. J’avais mal aux jambes qui refusaient d’avancer et j’avais mal à la poitrine en la regardant de dos, qui s’élançait dans les collines enneigées. J’avais été celui qui avait provoqué cette dispute. Je devais être celui qui y mettait fin. Alors que je ne m’y attendais pas, mes jambes se mirent à se mouvoir et je me tapai un sprint dans sa direction. J’étais plus rapide qu’elle, je le savais, il ne fallut pas beaucoup de temps avant que je la rattrape. J’avais failli m’éclater la tête sur le sol lorsque je lui attrapais le poignet. Je la ramenai contre moi et sentit son souffle contre mon cou. Elle allait essayer de se débattre, mais j’étais plus fort. Je savais qu’il ne restait qu’une chose à faire. Elle n’allait pas m’écouter raconter ma vie et je n’avais pas la patience de le faire. Alors j’écoutais pour une fois mon corps et sans réfléchir je fis quelque chose que je n’aurais jamais cru faire, surtout de cette manière-là. Seulement, c’était la seule preuve que je disposais. Je fis abstraction de la colère qui rongeait mon esprit, prit sa tête entre mes mains et posa mes lèvres contre les siennes.

Le contact fit l’effet d’un frisson qui parcouru mon corps. J’avais embrassé plusieurs filles, dans le passé, mais jamais avec autant de passion. J’avais l’impression que mon corps entier allait exploser. Je n’osais pas rouvrir les yeux et rompre le lien qui nous unissait, là, sur le moment qui semblait durer une éternité. Ses lèvres étaient fraîches, gercées, mais jamais j’avais autant apprécié un baiser. Elle semblait trembler. Il fallait que je me retire je le savais. J’étais à bout de souffle et le cœur battant à la chamade. En un murmure, je prononçais des mots que quelques minutes plus tôt je n’aurais jamais cru dire, sous le coup de la colère. "  Je t’aime Sun et je pense que là tu l’as eu, ta preuve. " Ce comportement ne me ressemblait pas du tout. J’étais faible. Mais bizarrement, j’aimais cette sensation de papillons dans le ventre.