Come as you are ~ ft Sora (terminé)

Il faisait bon à New York, pour la première fois depuis des jours. L’été new yorkais était le cauchemar de tous : la température montait très rapidement et avec toute la pollution, cela se transformait rapidement en enfer. Sans parler de tous ces touristes qui remplissaient davantage les rues déjà bondées… Bref, l’horreur. Heureusement, ce cauchemar était passé : une brise fraîche soufflait et le nombre de touristes perdus avait tellement diminué que plus personne ne s’en souciait. C’était dans cette ambiance-là que Neven filait à toute vitesse – littéralement, car ses pieds ne touchaient pas le sol. Elle ne savait pas ce que voyaient les mortels à travers la Brume, mais ils devaient sûrement imaginer qu’elle était la nouvelle Usain Bolt, une idée qui la faisait sourire.

Non seulement le temps était idéal mais en plus, aujourd’hui était un jour particulier. En effet, la nymphe avait rendez-vous avec celle qu’elle considérait comme sa propre fille, une sang-mêlée qu’elle n’avait pas vu depuis bien trop longtemps. Rien qu’à l’idée de la retrouver, son cœur s’emplissait d’un grand sentiment de joie et elle souriait bêtement, slalomant entre les passants sans jamais leur rentrer dedans. Elle était si pressée de la revoir qu’elle arriva avec vingt bonnes minutes d’avance au lieu de rendez-vous, un petit café dont les glaces avaient fait la réputation. Quand on a des siècles de vie derrière soi, on a un talent naturel pour dénicher les bons coins : en effet, le café était loin du boucan du centre-ville, ce qui, en plus de leur évitait de devoir crier pour se comprendre, leur permettait de passer à l’abri des regards. Non seulement Neven avait tendance à faire de plus en plus attention en se rendant à New York, de peur de recroiser ses vieux ennemis, mais elle imaginait bien que pour Sora, depuis son départ de la Colonie, c’était un peu la même situation. Pourtant, la distance ne les avait pas éloignées, bien au contraire, et l’ouranie se plaisait à croire que c’était plus que de la chance mais bien un petit coup de pouce du Ciel. Elle s’installa en terrasse, afin que la fille d’Eole la remarque facilement, et commanda un café pour l’accompagner durant ses vingt minutes d’attente.

Come as you are

Neven et Sora

Vite !

Je cours dans les rues comme une folle, détraquée, perdue. Je ressemble à ces touristes étrangers qui affluent à New-York et qui rendent la circulation totalement impossible, sans parler de cette chaleur assommante qui me prend aux tripes. C'est vraiment pas le jour pour être en retard, seulement, avec mon sens de l'orientation légendaire, je me suis encore perdue dans les avenues. On dirait que je suis un électron libre dans cette foule de gens qui n'ont que faire de mes soucis, ils passent sans un regard, plongé sur leurs portables, les yeux vitreux, ne profitant du monde. Je pense que depuis l'invention du téléphone portable, cela a créé une sorte de deuxième Brume. Les gens n'ont que faire de ce qui se passe, c'est bien triste. J'aimerais bien avoir un portable mais la seule fois où je m'en suis servie, une flopée de montres est apparut pour me féliciter d'en avoir un. Je jure dans ma langue maternelle, faut que je dépêche.

Aujourd'hui n'est pas un jour banal, bien au contraire, je vais LA revoir, je ne rêve que de ça depuis des mois, elle est mon seul regret, quitter la Colonie ne m'a rien fait, la quitter elle est plus dure que d'affronter en même temps toutes les divinités qui ont existé depuis le début de ce monde. Neven m'a vraiment manquée. La nymphe céleste a été pour moi une seconde mère, elle m'a appris à me servir de mes pouvoirs et surtout, m'a couvée de son amour maternel infini. Je suis à bout de souffle quand enfin je la vois, ses longs cheveux roses flottant au vent, je suis presque sûre que c'est elle qui a forcé le vent à faire ça. A cette instant, elle est plus belle que toutes les déesses réunies, Aphrodite me paraît être un laideron à côté de Neven.

Je me précipite vers elle, comme une gamine, j'en ai rien à faire des passants qui me regardent d'un oeil interrogateur, tout ce que je veux, c'est ma Maman. Je me jette dans ses bras et me laisse bercer sans rechigner, je suis instantanément calmée par l'odeur de sa peau, comme les mamans qui calment leur bébé avec leur voix. Je sens qu'elle me caresse les cheveux comme avant quand j'étais énervée, je me blottie encore plus contre elle:

"Maman ... Tu m'as tellement manquée !"

Je calme l'émotion dans ma voix et je reprends, avec enthousiasme :

"J'ai un tas de choses à te raconter ! Comment tu vas, Maman ?"

Code by Sleepy

Un éclair passa soudainement devant Neven et elle se retrouva avec une jeune fille dans les bras sous les regards mauvais des passants interloqués. La nymphe eut un sourire amusé, serra contre elle Sora tout en caressant ses longs cheveux châtains qu’elle n’avait pas touchés depuis si longtemps.

« Maman ... Tu m'as tellement manquée ! » Lui dit-elle d’une voix qui cachait mal ses émotions. « J'ai un tas de choses à te raconter ! Comment tu vas, Maman ? »

Maman. L’entendre prononcer par la voix enfantine de Sora lui avait tout autant manqué. Voir celle qu’elle avait considérée comme sa propre fille quitter le nid lui avait fendu le cœur – mais son rôle n’était pas de la retenir, elle le savait pertinemment.

« Oh, tu sais, la routine… » Répondit-elle en souriant, ses yeux pétillants de malice. Qu’est-ce qu’était la routine dans la vie d’une nymphe céleste, chassée de l’Olympe, traqueuse de demi-dieux égarée et, de temps à autre, briseuse de cœur ? « Je traîne un peu partout, j’ai revu Ness il y a pas très longtemps – d’ailleurs, il m’a un peu parlé de toi ! » Elle joua avec l’une des mèches de cheveux de la petite asiatique tandis que les étoiles parcourant sa peau formaient des cœurs le long de ses bras.

« Et toi alors ? Tu t’en sors, toute seule comme tu es ? Tu manges comme il le faut ? Tu sais, même si j’ai interdiction de mettre le pied dans une cuisine, si tu as besoin que je te cuisine des petits plats je suis prête à renoncer à mes mille prochaines années de vie pour te cuisiner quelque chose ! À ton âge, on a besoin de manger ! »

Elle prit ensuite le visage de la fille d’Eole entre ses mains et l’observa attentivement, comme pour voir ce qui avait changé depuis la dernière fois qu’elle l’avait vue.

« Tout le monde est gentil avec toi là où tu es ? Personne ne te cherche des noises ? Tu sais qu’au moindre souci, je peux venir… Je sais casser un genou en une seule prise, impressionnant, hein ? Tu sais que tu peux compter sur moi pour n’importe quoi. » Elle lui tendit ensuite la carte du café, lui désignant les pâtisseries. « Choisis quelque chose à manger, je te l’offre ! »

Come as you are

Neven et Sora

Je me laisse bercer tendrement, respirant son parfum avec délice, le monde pourrait s’écrouler, se briser en mille morceaux, je n’en aurais rien à faire. Tant que je suis dans les bras de mon immortelle de mère, rien ne peux arriver, pas même l’apocalypse. J’oublie tous mes soucis, ils me semblent bien dérisoire. Ils coulent sur Neven comme de l’eau, ruissellent sans que jamais elle ne soit mouillée. En 3 mille ans d’existence, elle a dû vivre un tas d’évènements plus tragiques les uns que les autres. L’idée de me dire que Neven me verra mourir ainsi que mes enfants me chagrine, elle a connu tant de gens qui ne sont plus, obligée de continuer sa route sans ne pouvant rien faire, elle fera de même pour moi mais quand même, je me sens vraiment triste, pauvre Maman, voir ses enfants disparaître et la laissant seule encore et encore, quel supplice !

Je resserre mon étreinte à cette pensée, essayant de l’oublier, rien n’y fait. Ca doit être le prix de l’Immortalité, tout à un prix, celui-là est la mesure du pouvoir octroyer mais diantre ! Moi la mortelle que je suis le trouve bien trop grand !

« Oh, tu sais, la routine… »

Je relève la tête, nous n’avons pas la même façon de nommer la routine, le temps ne l’effleure pas, je me demande si elle s’est rendue compte depuis combien de temps je partie, plus rapide qu’un battement de cil je suppose, cela va faire 6 mois que je ne suis plus près d’elle. Lui ai-je vraiment manqué ? Je ne préfère pas savoir.

« Je traîne un peu partout, j’ai revu Ness il y a pas très longtemps – d’ailleurs, il m’a un peu parlé de toi ! »

Elle joue avec mes cheveux comme avant, Ness … ? Il y a si longtemps que je ne l’ai pas vu, autrefois, je l’appeler Papa, je me sens honteuse d’un coup. Je l’ai comme ‘remplacé’ par Cyril, bien que j’aime profondément les deux hommes, Cyril correspond plus à la description d’un père, enfin qu’est-ce que j’en sais ? Je suis née orpheline de père, qu’est-ce qu’un bon parent ? Qu’est-ce que j’en sais ? Moi qui ai trahis la seule famille qu’il me reste. En cet instant et pour la première fois de ma vie, je suis sur le point de regretter mon choix de vie, rejoindre la Résistance était-il un bon choix ? N’aurais-je pas dû changer les choses de l’intérieur, sans trahir personne, les gens peuvent changer, j’en suis sûre, surtout pour le bien de tous. Mais en même temps, j’ai l’impression de souiller la mémoire de mes camarades morts au combat, je leur ai juré de changer les choses, leur mort ne sera pas vaine, je refuse de croire que tout ceci est était vain. Les dieux ont promis de changer, ils l’ont juré ! Alors où est le changement ? Ils ont menti, ils se sont joués de nos espoirs, tout immortels qu’ils sont, ils ignorent tout du deuil. Ils ignorent la douleur de porter les corps sans vie encore chaud, presque palpitant.

« Et toi alors ? Tu t’en sors, toute seule comme tu es ? Tu manges comme il le faut ? Tu sais, même si j’ai interdiction de mettre le pied dans une cuisine, si tu as besoin que je te cuisine des petits plats je suis prête à renoncer à mes mille prochaines années de vie pour te cuisiner quelque chose ! À ton âge, on a besoin de manger ! »

Je lui souris de toute mes dents, tu ne fais partie des méchants Maman, toi, tu es la seule gentille, toi, tu n’es qu’amour, je jure de changer les choses pour qu’enfin, nous nous ne quittions plus jamais, rien que toi et moi, Maman.

« Eh bien, les premiers temps ont été durs, mais le monde extérieur est si grand Maman ! J’en apprends tous les jours, il n’est pas aussi dangereux que vous le disiez à la Colonie, je me sens libre, je peux marcher parmi les nuages sans aucune crainte, j’ai l’impression d’être une nymphe céleste, comme toi, et c’est vraiment fantastique ! »

Je me rends compte que je n’ai absolument pas répondu à sa question, tellement emballée de lui dire à quoi ressemble le monde, celui que j’ai rêvé si longtemps, lui dire à quel point j’en avais assez d’en avoir peur comme de mon ombre.

« Je mange tous les jours à ma faim mais rien ne vaut ta cuisine ! Elle a ce quelque chose qu’aucun autres plats n’a, je ne sais pas ce que c’est mais ça les rend inoubliable !"

Elle me prend alors doucement le visage, scrutant chaque parcelle de ma peau, voir si je n’ai pas de marques, à part la fatigue, j’ai un teint de pêche, rien à voir quand je suis arrivée au QG, j’ai trimé dur pour atteindre le niveau auquel je suis, j’avais des bleus et des meurtrissures partout, je ressemblais à un cadavre ambulant, à un zombie en somme. Je suis beaucoup plus musclée et je suppose que mon regard est plus dur qu’avant.

« Tout le monde est gentil avec toi là où tu es ? Personne ne te cherche des noises ? Tu sais qu’au moindre souci, je peux venir… Je sais casser un genou en une seule prise, impressionnant, hein ? Tu sais que tu peux compter sur moi pour n’importe quoi. »

« T’inquiète ! Tu m’as appris à me défendre ! Je refuse que quiconque me marche sur les pieds ! Mais si un jour j’ai un souci, je t’appelle de suite ! »

Elle se tourne vers la table, j’en avais presque oublié le pourquoi de notre venu.

« Choisis quelque chose à manger, je te l’offre ! »

« Ne me tente pas, je vais encore prendre des kilos ! »

Je lui obéis néanmoins, il y a longtemps que je n’avais pas mangé de pâtisseries en tout genre, je me choisis au bout de quelques minutes une tartelette à la fraise. On se pose à la table, je regarde ma mère en souriant.

« En fait Maman, je voulais te dire que j’ai rencontré quelqu’un.»

Sa fourchette reste en suspens dans le vide, sois par inquiétude, sois curieuse d’en savoir plus, aucune idée.

« Il s’appelle Clayton et c’est vraiment un gentil garçon Maman, je n’ai jamais connu quelqu’un d’aussi attentionné, je me sens comme une princesse quand je suis avec lui, je me sens si heureuse avec lui ! »

Code by Sleepy

Le sourire de Sora rallume dans son cœur un feu qu’elle avait cru éteint pendant son absence. À la Colonie, ce n’est plus pareil – elle adore les sangs mêlés mais pas autant. Sora, elle l’aime encore plus, comme une mère aime sa fille, un amour bien plus profond. Il n’y a qu’elle pour la faire sourire comme ça – et la petite le sait pertinemment.

« Eh bien, les premiers temps ont été durs, mais le monde extérieur est si grand Maman ! J’en apprends tous les jours, il n’est pas aussi dangereux que vous le disiez à la Colonie, je me sens libre, je peux marcher parmi les nuages sans aucune crainte, j’ai l’impression d’être une nymphe céleste, comme toi, et c’est vraiment fantastique ! » Lui répondit-elle, l’air plus qu’enthousiaste. C’est vrai, le monde extérieur est fascinant ! C’était bien pour le découvrir que la nymphe avait quitté le foyer rassurant de l’Olympe, la maison qu’était le ciel pour elle… Le monde des humains était son obsession. Comme un ange déchu, elle était tombée du ciel pour s’effondrer sur terre. On lui avait brisé le cœur, on lui avait marché dessus, on avait profité d’elle et de ses faiblesses. Sora ne pouvait pas s’en douter, elle était si jeune, si douce, si innocente. Comment un être plein d’amour comme elle pouvait imaginer un seul instant les dangers que le monde en dehors de la Colonie présentait ? Oh non, elle ne pouvait pas lui dire, elle ne pouvait pas lui briser ses rêves. Elle mordit l’intérieur de sa bouche et continua d’écouter attentivement les paroles de sa petite fille. « Je mange tous les jours à ma faim mais rien ne vaut ta cuisine ! Elle a ce quelque chose qu’aucun autres plats n’a, je ne sais pas ce que c’est mais ça les rend inoubliable ! »

« Je suis ravie de voir que tu t’en sors aussi bien. Je n’en attendais pas moins d’une battante comme toi ! » Neven lui adressa un grand sourire, remarquant bien les changements s’étant opérés chez la fille d’Eole. Elle fait plus mature, plus forte. Elle qui était un petit oisillon à la Colonie avait enfin pris son envol – mais était-ce seulement dû au fait de quitter le nid ?

« Tout le monde est gentil avec toi là où tu es ? Personne ne te cherche des noises ? Tu sais qu’au moindre souci, je peux venir… Je sais casser un genou en une seule prise, impressionnant, hein ? Tu sais que tu peux compter sur moi pour n’importe quoi. »

« T’inquiète ! Tu m’as appris à me défendre ! Je refuse que quiconque me marche sur les pieds ! Mais si un jour j’ai un souci, je t’appelle de suite ! » Lui assura-t-elle en souriant et Neven n’eut même pas besoin de preuves pour la croire. Elle voyait bien qu’elle était à présent parfaitement capable de se défendre seule, comme une grande. Ah, le temps passait si vite…

Elle lui proposa alors de choisir quelque chose à manger et, quelques minutes plus tard, un serveur revint avec une tartelette à la fraise et un éclair au café qu’il déposa sur la table avant de s’éclipser aussitôt. Gourmande comme elle l’était, la nymphe céleste attrapa aussitôt la petite assiette, joliment décorée, et commença à manger sa petite pâtisserie.

« En fait Maman, je voulais te dire que j’ai rencontré quelqu’un.»

Alors qu’elle s’apprêtait à prendre une seconde bouchée d’éclair, elle stoppa sa cuillère dans les airs et écarquilla les yeux. Rencontrer quelqu’un ?! Elle était suffisamment vieille pour savoir ce qui allait venir ensuite ! Mais Sora avait-elle l’âge pour l’amour ? N’était-ce pas un peu trop jeune ? Bons dieux, le temps passait si vite !

« Il s’appelle Clayton et c’est vraiment un gentil garçon Maman, je n’ai jamais connu quelqu’un d’aussi attentionné, je me sens comme une princesse quand je suis avec lui, je me sens si heureuse avec lui ! » Continua Sora. Et c’était vrai, elle avait vraiment l’air amoureuse : son regard se réchauffait, elle semblait emplie d’une énergie nouvelle. De la même façon que découvrir le monde extérieur l’avait rendue plus forte, Neven pouvait très bien voir que l’amour y était aussi pour quelque chose, qu’elle y avait découvert un véritable trésor.

« Ma puce… Je ne sais pas comment te dire, je suis vraiment ravie pour toi ! Mais avant d’officialiser quoique ce soit, je veux le rencontrer. Il n’aura le droit de te fréquenter qu’après avoir passé mon test – je veux savoir s’il te mérite. » Dit-elle en agitant sa cuillère d’un air un peu plus sévère, en vraie maman-poule qu’elle était. « L’amour est quelque chose de formidable à condition qu’il grandisse dans un jardin bien entretenu. Chaque personne que tu rencontres est un être complexe qui ne demande qu’à aimer et être aimé. Mais l’amour peut faire des ravages, alors je te conseille de bien faire attention à ceux à qui tu offres la clé de ton cœur. De l’amour à la destruction, il n’y a qu’un pas, c’est pour cela qu’Arès et Aphrodite sont autant attirés l’un par l’autre, c’est pour cela qu’est née de leur union Harmonie, mais aussi Phobos et Déimos, esprits des peurs. L’amour engendre de belles et terribles choses. »

Elle inclina la tête, repensant à diverses histoires du passé lui ayant toutes brisé le cœur. Elle ne voulait en aucun cas que cela arrive à Sora – il fallait espérer que ce Clayton soit le bon, son âme-sœur. Sinon, elle ne lui pardonnerait jamais. Quiconque faisait du mal à sa fille risquait bien plus cher que sa vie.

« En tout cas, je veux tout savoir ! Comment vous êtes-vous rencontrés ? Est-ce qu’il te fait sentir comme la personne la plus incroyable de ce monde ? Est-ce qu’il donnerait sa vie pour toi ? »

Come as you are

Sora et Neven

Maman pose sa cuillère, elle semble hésiter à me dire quelque chose, la pauvre, je la malmène vraiment. Hier, j'étais son enfant qui s'accrochait à sa robe de peur qu'elle s'envole et qu'elle ne revienne jamais, quand j'y repense, j'ai passé cinq ans à être dans ses bras, c'est peut-être pour cela que je n'étais pas vraiment un excellente combattante, je préférais jouer avec elle et créer des nuages plutôt que de manier les armes. Je me rends compte aussi que je refusais que les autres enfants l'approchent, c'est ma maman, pas la vôtre !

A ses yeux, j'ai dû grandir bien vite, en quelques mois, je suis devenue une adulte, une guerrière, un assassin. A cette idée, je ferme les yeux, j'aime ce côté sombre de ma personnalité, j'aime ce sentiment de puissance, mais devant ma mère, je trouve ce sentiment futile, j'en ai honte. Quel genre de vie a eu Neven pour avoir une fille comme moi ? Comment ai-je le droit de regarder ma mère dans les yeux, comme si rien n'était, à lui raconter mes histoires de coeur comme une parfaite adolescente.

A cet instant, je me rends compte que j'ai maintenant une double personnalité: l'une où je joue les filles parfaites, la fille courageuse qui se bat pour ses idées et l'autre, un assassin. Une tueuse. Je ne veux pas renoncer à ce que je suis mais mais là, j'ai envie de tout arrêter.

« Ma puce… Je ne sais pas comment te dire, je suis vraiment ravie pour toi ! Mais avant d’officialiser quoique ce soit, je veux le rencontrer. Il n’aura le droit de te fréquenter qu’après avoir passé mon test – je veux savoir s’il te mérite. »

Elle agite sa cuillère d’un air un peu plus sévère, en vraie maman-poule qu’elle est. Un test ? Je ne suis pas sûre d'aimer ça.

« L’amour est quelque chose de formidable à condition qu’il grandisse dans un jardin bien entretenu. Chaque personne que tu rencontres est un être complexe qui ne demande qu’à aimer et être aimé. Mais l’amour peut faire des ravages, alors je te conseille de bien faire attention à ceux à qui tu offres la clé de ton cœur. De l’amour à la destruction, il n’y a qu’un pas, c’est pour cela qu’Arès et Aphrodite sont autant attirés l’un par l’autre, c’est pour cela qu’est née de leur union Harmonie, mais aussi Phobos et Déimos, esprits des peurs. L’amour engendre de belles et terribles choses. »

Je suis refroidie d'un coup. Je ne peux pas lui en vouloir, 3 millénaires d'existence, elle a dû en voir des vertes des pas mûres. Mais pourquoi n'est-elle pas contente ? Maman ne m'a jamais racontée ses histoires d'amours, à part celle qu'elle a eu avec Ness mais c'est une autre histoire. J'aperçois dans ses yeux tour à tour de la colère, du désespoir et surtout de l'inquiétude. J'attrape sa main.

"C'est parce que c'est le sentiment le plus fort qu'il faut le vivre, peut-être que je fonce dans un mur mais si je ne le vis pas maintenant, comment pourrais-je savoir ce que c'est ? Tu m'as appris à vivre ses émotions à fond pour que jamais, j'ai des regrets."

Je lui souris, comme je t'aime Maman, je te remercie de tout mon coeur de t'inquiéter pour moi.

« En tout cas, je veux tout savoir ! Comment vous êtes-vous rencontrés ? Est-ce qu’il te fait sentir comme la personne la plus incroyable de ce monde ? Est-ce qu’il donnerait sa vie pour toi ? »

Je lui souris, un peu gênée, ne sachant pas trop où commencer.

"Je t'avoue que je ne sais par pas où commencer Maman. Je l'ai rencontré à New York, ça été comme une sorte de coup de foudre, comme si, tout au fond de moi, je savais que c'était lui que je voulais pour le reste de ma vie, que c'était lui avec qui je voulais vieillir. C'était un sentiment à la fois confus et si net, pour la première fois de ma vie, j'ai vu un avenir clair."

Je m'arrête et je me mets à sourire bêtement, je rougis aussi sans doute, je me sens fébrile.

"Maman, il m'a accepté comme je suis, il a peur de ne pas être assez bien pour moi, il me dit tout le temps qu'il est l'homme le plus heureux du monde. Par contre, il a un mal fou à montrer son affection, il est un peu empoté sur les bords. Maman, ce type là ne donnerait pas sa vie pour moi mais son âme, c'est bizarre ce que je viens de dire. Mais tu as compris ce que je voulais dire ?"

Je m'arrête pour boire une gorgée, là c'était la partie facile de la description, à ce niveau là, je suis presque sûre qu'elle va devenir hystérique ou parfaitement calme et je ne sais pas laquelle de ces options je préfère. Je prends une inspiration.

"C'est un mortel."

Je ferme un oeil, autant tout déballer tout de suite avant que ma mère fasse un arrêt cardiaque, ce qui va être quand même vachement compliqué en sachant qu'elle est immortelle."

"C'est un anglais, il vit à New York, médecin, très bonne famille, très bien élevé, riche. Et euuh, il a euh comment dire ? Juste 26 ans ?"

Je parle tellement bas que je me demande si elle entendu le bout de ma phrase. Je m'attends à vivre l'apocalypse.

Code by Sleepy

Sora lui attrapa alors la main et lui dit d’un ton plein de conviction, témoignant de toute l’affection qu’elle devait porter à ce fameux Clayton. Cela surprit la nymphe – après tout, des sentiments comme ça, on avait du mal à en trouver des aussi authentiques.

« C'est parce que c'est le sentiment le plus fort qu'il faut le vivre, peut-être que je fonce dans un mur mais si je ne le vis pas maintenant, comment pourrais-je savoir ce que c'est ? Tu m'as appris à vivre ses émotions à fond pour que jamais, j'ai des regrets. »

Et elle n’avait pas tort. Neven faisait de son mieux pour pousser ses oisillons à vivre leur vie à fond et à ne jamais faire de concessions. Vos émotions sont votre plus grande force, elle le répétait tout le temps. Alors elle esquissa un sourire et la questionna sur leur rencontre, leurs sentiments. Si Sora avait quelqu’un dans sa vie, autant tout savoir sur lui.

« Je t'avoue que je ne sais par pas où commencer Maman. Je l'ai rencontré à New York, ça été comme une sorte de coup de foudre, comme si, tout au fond de moi, je savais que c'était lui que je voulais pour le reste de ma vie, que c'était lui avec qui je voulais vieillir. C'était un sentiment à la fois confus et si net, pour la première fois de ma vie, j'ai vu un avenir clair. » Elle marqua une pause, un sourire béat sur les lèvres et les joues teintées de rouge. Ah, l’amour… Elle le porte à merveille. « Maman, il m'a accepté comme je suis, il a peur de ne pas être assez bien pour moi, il me dit tout le temps qu'il est l'homme le plus heureux du monde. Par contre, il a un mal fou à montrer son affection, il est un peu empoté sur les bords. Maman, ce type là ne donnerait pas sa vie pour moi mais son âme, c'est bizarre ce que je viens de dire. Mais tu as compris ce que je voulais dire ? »

Oui, elle comprenait. La notion de vie, c’était tellement abstrait pour elle et pour tout ceux inscrits dans le monde mythologique en général. Donner sa vie ? Donner son âme. Elle était contente que sa fille ait trouvé un garçon capable de lui déclarer ce genre de choses, cela signifiait qu’il était réellement sérieux dans leur relation et qu’il ne comptait pas lui faire du mal. Sora marqua une nouvelle pause, prenant le temps de boire quelques gorgées, comme si la suite était un peu plus tendue. Finalement, elle déclara.

« C'est un mortel. »

Et Neven ouvrit de grands yeux.

« UN MORTEL ? »

Et Sora déballa tout d’une toute petite voix, à une telle vitesse que l’ouranie peine à discerner les derniers mots.

« C'est un anglais, il vit à New York, médecin, très bonne famille, très bien élevé, riche. Et euuh, il a euh comment dire ? Juste 26 ans ? »

C’en était beaucoup trop pour elle. Elle renversa sa tasse tandis que les constellations sur sa peau commencèrent à s’animer dans tous les sens, formant des véritables tourbillons en action le long de ses bras.

« Tu as perdu la tête ? Tu n’as donc aucune conscience du danger que représente le monde en dehors de la Colonie, à tel point que tu commences à fréquenter des mortels ? » Elle prit une grande inspiration pour ne pas dire de choses qu’elle risquerait de regretter plus tard. « Tu sais bien qu’en traînant avec toi, il s’expose à tous les dangers. Tu l’exposes à tous ces dangers. Est-ce que tu en as pleinement conscience ? » Demanda-t-elle d’un air grave, avant de se rendre compte que c’est exactement le même discours que sortirait Chiron à sa place. Or, elle n’était pas Chiron, ce n’était pas elle la donneuse de leçons. Mais d’un côté, elle tenait tant à Sora, elle ne voulait qu’on lui fasse aucun mal…

« Je… Crois-moi, c’est très compliqué. Je veux que tu sois la plus heureuse du monde et si ce Clayton contribue à ton bonheur, il a ma bénédiction. Mais c’est un mortel, et ils sont tellement fragiles… Je me fais du souci pour toi. Est-ce que tu lui as dit pour notre monde ? » Demanda-t-elle d’un air anxieux, épongeant distraitement le liquide répandu sur la table et ses vêtements.

Come as you are

Neven et Sora

Je m'attendais à recevoir une rafale de vent, mais là, c'est là, c'est une tornade capable de détruire le monde, je ferme les yeux, finalement, fausse bonne idée. J'aurais dû la préparer psychologiquement avant de parler de mon superbe fiancé qui est quand même le mec le plus parfait qui soit. D'une certaine manière, je suis très contente que Maman n'est pas remarqué la bague qui orne mon doigt, je remercie secrètement Clayton de m'avoir offert une alliance discrète, belle et parfaite.

Je regarde ma mère, elle a l'air perdu, inquiète et se retient de me dire le fond de sa pensée, comme si l'idée que je sois amoureuse était impossible, comme si l'amour était une maladie pernicieuse que je devais éviter à tout prix, une maladie qui ronge tout ce qu'elle touche, une sorte de magie plus forte encore que les dieux car elle frappent ces derniers aussi.

« Tu as perdu la tête ? Tu n’as donc aucune conscience du danger que représente le monde en dehors de la Colonie, à tel point que tu commences à fréquenter des mortels ? »

J'ouvre la bouche, profondément choquée. Maman parle des mortels comme si ils étaient dangereux. Le monde est dangereux ? Il l'a toujours été Maman, je ne veux plus vivre caché en pensant que tout est beau, que tout est joli, que tout le monde s'aime. Le monde n'est pas noir ni blanc, il est gris Maman.

« Tu sais bien qu’en traînant avec toi, il s’expose à tous les dangers. Tu l’exposes à tous ces dangers. Est-ce que tu en as pleinement conscience ? »

Je la regarde, le regard ô combien nuageux, signe que je suis triste et en colère. Je serre les poings le regard tellement triste.

"Je l'ai repoussé pour le sauver bien entendu, seulement, il m'a dit une chose Maman, il m'a dit qu'il préférait mourir par un monstre que de me laisser partir. Il a accepté les conditions sans broncher. Il veut me protéger de ma nature, il essaie de me donner une vie normale, sans monstres. Comme quand j'étais enfant."

Je continue sur ma lancée, essayant de la convaincre

"Je suis heureuse de la vie que j'ai mené à la Colonie, mais la vie que j'avais avant me manquais, je n'ai pas envie d'être une combattante, je veux avoir des enfants, je ne veux pas tenir une épée Maman."

Elle me regarde, le visage triste, je vois à quel point elle essaie de jouer le rôle d'une mère, protectrice jusqu'au bout. Je regarde le liquide qui se répand sur la table, il y a un vent froid qui souffle, je frissonne. J'ai pensé qu'elle me suivrait mais j'avais tort, elle refuse de me voir grandir, elle refuse que je sois adulte, mais il s'agit de Clayton. Je refuse de le quitter, je refuse de le perdre mais d'un autre côté, je ne veux pas perdre ma mère.

« Je… Crois-moi, c’est très compliqué. Je veux que tu sois la plus heureuse du monde et si ce Clayton contribue à ton bonheur, il a ma bénédiction. Mais c’est un mortel, et ils sont tellement fragiles… Je me fais du souci pour toi. Est-ce que tu lui as dit pour notre monde ? »

Je souris enfin, je me détends un peu, elle essaie de faire un effort, je dois en faire un aussi.

" Il voit Maman, il connaissait le monde mythologique bien avant qu'on se rencontre, il a essayé de comprendre et de ne pas devenir fou. Il a essayé de fermer les yeux mais tu connais le refrain, plus tu essaies de t'enfuir de ce monde, plus il essaie de te rattraper. Clayton est dans ce cas. Ca été compliqué au début mais maintenant ça va mieux."

Le vent souffle toujours, je me sens mal à présent, quelque chose s'est brisé, la confiance ? Non, j'ai toujours confiance en ma mère ? Non, je crois que j'ai grandi trop rapidement, elle a du mal, elle doit avoir mal. Maman doit se dire que je vais continuer à vieillir mais pas elle, je vais avoir des enfants qui vont grandir eux-aussi. Et puis ...

Je vais mourir.

Elle va porter le deuil, encore une fois, et ce sera pas la dernière fois, Maman me verra mourir, je me mets à comprendre. Neven revit la même chose à chaque fois, elle rencontre un demi-dieu qu'elle élève, qu'elle couve, qu'elle aime plus que tout au monde mais cet enfant finit toujours par mourir, souvent à cause des monstres, des fois de maladies mais rarement de vieillesse. Je lui prends les mains, encore une fois.

"Maman, je sais que c'est prématuré, c'est même fou, mais il est là plus belle chose qui soit, je sais que l'amour, c'est dangereux mais si je ne le vis pas maintenant, quand vais-je le vivre ?"

Je lui demande doucement, je me demande si en disant ça, je ne la blesse pas, si je ne l'a mets pas en colère, mais on ne pas toujours être en accord.

"Je te remercie de me protéger chaque jour qui est et qui sera, je suis désolée d'être aussi téméraire, je t'aime de tout mon coeur Maman et je tiens à te dire que Clayton est un homme de confiance, sinon, je ne l'aurais pas choisi."

J'espère que ces mots pourront la rassurer, au moins un peu.

Code by Sleepy

« Je l'ai repoussé pour le sauver bien entendu, seulement, il m'a dit une chose Maman, il m'a dit qu'il préférait mourir par un monstre que de me laisser partir. Il a accepté les conditions sans broncher. Il veut me protéger de ma nature, il essaie de me donner une vie normale, sans monstres. Comme quand j'étais enfant. » Réplique-t-elle, et Neven perçoit dans sa voix sa tristesse. « Je suis heureuse de la vie que j'ai mené à la Colonie, mais la vie que j'avais avant me manquais, je n'ai pas envie d'être une combattante, je veux avoir des enfants, je ne veux pas tenir une épée Maman. »

Les dernières paroles de sa fille brisent quelque chose dans son cœur. Les demi-dieux sont toujours entraînés au combat, comme s’ils n’avaient qu’une seule fonction : mourir. Les années passaient et c’était toujours le sort qu’on leur réservait. Mourrez, car vous êtes nés pour ça. La mort les transforme en héros, c’est ce que les dieux racontent… Mais qu’en savent les immortels, ceux sur qui le poids de la mort ne pèse pas ?

« Il voit Maman, il connaissait le monde mythologique bien avant qu'on se rencontre, il a essayé de comprendre et de ne pas devenir fou. Il a essayé de fermer les yeux mais tu connais le refrain, plus tu essaies de t'enfuir de ce monde, plus il essaie de te rattraper. Clayton est dans ce cas. Ca été compliqué au début mais maintenant ça va mieux. »

Bien sûr que c’est compliqué. C’est toujours compliqué, ça ne change jamais. Sa gorge se serre tandis qu’elle tâche d’éponger le café renversé sur la table et ses vêtements. Sora continue de parler, mais sa voix se fait lointaine, comme si elle était dans un autre monde.

« Maman, je sais que c'est prématuré, c'est même fou, mais il est là plus belle chose qui soit, je sais que l'amour, c'est dangereux mais si je ne le vis pas maintenant, quand vais-je le vivre ? » Lui dit-elle tout en lui prenant les mains, pleine de convitions.

« Mais pourquoi ne veux-tu pas le vivre avec quelqu’un comme toi ? Sora, mon cœur… Tu es une demi-déesse. Que tu le veuilles ou non, tu es un aimant à problèmes. Tu auras beau essayé, tu n’auras jamais la vie normale. Même si un beau garçon te le promet, cela n’arrivera jamais et tu sais très bien pourquoi. » La nymphe tourne la tête, fermant les yeux quelques secondes. « Je sais que l’amour est dangereux… Mais il ne doit pas te coûter la vie. Je ne veux pas avoir à te perdre. Je ne veux pas que tu te mettes en danger pour protéger celui que tu aimes, car c’est ce que tu vas faire. C’est la vie que tu choisis en l’aimant : être en permanence en proie aux monstres, aux horreurs dont j’ai toujours essayé de te protéger. Ce sera soit toi, soit lui qui en paiera le prix. Dans tous les cas, ça me brisera le cœur. » Finit-elle d’une toute petite voix, cherchant à ravaler le goût amer qui reste coincé au fond de sa gorge. Ses yeux brûlent, mais elle ne peut pas se permettre de pleurer devant Sora. Elle doit monter l’exemple, elle doit se montrer forte. Sinon, comment peut-elle prétendre la protéger ?

« Je te remercie de me protéger chaque jour qui est et qui sera, je suis désolée d'être aussi téméraire, je t'aime de tout mon coeur Maman et je tiens à te dire que Clayton est un homme de confiance, sinon, je ne l'aurais pas choisi. » Finit par lui assurer Sora, sûrement dans le but de la rassurer. Mais cela ne fait que lui briser davantage le cœur. Elle ne peut pas la faire changer d’avis, ce qui signifie que sa petite fille sera constamment exposée au danger, en proie à tous ces monstres dont elle n’a même pas idée de leur existence. Lâchant la main de sa fille, elle essuie la larme qui coule le long de sa joue. Si seulement elle pouvait protéger ceux qu’elle aimait, tout ceci n’arriverait pas. Mais le monde était contre elle : il ne la laissera jamais en paix.

« Ce n’est pas une question de confiance, c’est une question de survie. Tout ça… L’amour n’a pas de place dans une vie comme la tienne, surtout avec un mortel. Le Destin n’aime pas les couples heureux, et il y a déjà tant de dangers dans ta vie… Pourquoi la risquer davantage en aimant Clayton ? Je ne veux pas avoir à perdre encore quelqu’un, je ne veux pas te perdre Sora. Quand tu m’annonces ça, c’est comme si tu m’annonçais ton enterrement. »

Come as you are

Comme je t'aime Maman

Je ferme les yeux, empêchant fermement les larmes de couler. J'ai le coeur fendu en deux, une parfaite scission, un dilemme parfait, telle une balance en un parfait équilibre. Je dois choisir. La raison ou le coeur. Les deux parties se valent, les deux vont me faire cruellement souffrir et me faire vivre. Je ne suis pas un héro, je n'en suis plus une. Je suis une résistante. Je veux faire tomber l'Olympe, la détruire et avec elle, les parques qui sont injustes et qui ne savent pas bien punir. Aldric a raison, pourquoi les demi-dieux doivent-ils se battre pour mourir ensuite ? Pourquoi le bonheur nous est-il interdit, telle une porte inviolable devant laquelle on reste devant tout au long de son existence. Je regarde Maman qui comprend, qui comprend ô combien ce dilemme me tue, qui sait que quelque choix que je vais faire, j'en paierai les conséquences. Pas aujourd'hui, pas demain, mais un jour. Un immense sablier s'est activé dans mon coeur, chaque grains me rapprochant un peu plus de la sentence ô combien cruelle. Un agaçant tic-tac se met en marche dans ma tête.

« Ce n’est pas une question de confiance, c’est une question de survie. Tout ça… L’amour n’a pas de place dans une vie comme la tienne, surtout avec un mortel. Le Destin n’aime pas les couples heureux, et il y a déjà tant de dangers dans ta vie… Pourquoi la risquer davantage en aimant Clayton ? Je ne veux pas avoir à perdre encore quelqu’un, je ne veux pas te perdre Sora. Quand tu m’annonces ça, c’est comme si tu m’annonçais ton enterrement. »

Je n'arrive plus à les retenir plus longtemps, elles coulent, silencieusement, arrachant une partie de mon âme. Une partie de moi a envie de hurler à m'en arracher les tympans, hurlant toute ma rage et ma douleur, je ne voulais plus de cette vie, je n'ai jamais voulue de cette vie, j'ai toujours voulu rester humaine, avoir ma maison en Floride, retourner au Japon avec ma mère d'où je soupçonne d'être la fille de Chioné, après avoir fait moult recherche sur elle, l'idée qu'elle soit aussi une demie-déesse me paraît de plus en plus probable mais pourquoi me l'avoir caché ? Je viens enfin de comprendre.

Elle n'en voulait pas non plus de cette vie. Elle n'en avait rien à faire des dieux et du monde, elle voulait sa vie à elle. Seulement, mon odeur devait être plus forte que la sienne et elle m'a emmené à contre coeur à la Colonie. Elle a fui son destin qui l'a rattrapée. Mais elle a été heureuse. Même si sa mort est pour moi un désastre, elle a été heureuse. Elle a mené sa vie sans aucun regret.

Je regarde Maman, celle qui a pris le relais après le décès de la première. Celle qui m'aime au delà de tout. Je la regarde, les yeux embuée de larme. Je sais que la vie est dure et injuste et que jamais, je n'aurais le droit à un répit quelconque. Je relève la tête.

"Ma vie sera toujours un enfer et le sera toujours. Je n'ai le droit que de mourir pour la gloire des dieux, si ce n'est pas le cas, je serais considérée comme une traîtresse qui subira le châtiment des Bienveillantes pour le reste de mon existence."

Je baisse la tête, ma gorge me fait mal, j'ai envie de suffoqué mais je ne vais pas lui mentir sur ma philosophie de vie, je dois lui en substance ma piètre vision que j'ai du monde divin, même si elle en fait partie, d'une certaine manière.

"Je n'ai pas envie de les servir, je n'ai pas envie d'être un héro, je veux choisir ma vie et ce n'est pas celle-là Maman. J'ai tellement souffert de mon père qui n'a jamais eu un mot pour moi, j'ai souffert de perdre ma mère biologique et de sa famille au Japon, de perdre Pandore, de mes amis. Je ne le supporte plus, j'entends leurs voix qui résonnent en permanence, leurs cris d'agonie Maman. Je ne veux plus les entendre, même si je dois en payer le prix un jour, je ne veux plus, non. Je ne peux plus."

Je prends ma tête dans mes mains, aussitôt, je suis parcourue de frisons et de spasmes. Je me retrouve dans un autre lieux, à une autre époque. Je suis en armure et j'ai mes épées dans chaque mains, le souffle me manque, je suis couverte de poussière et de sang. A mes pieds gît le corps sans vie d'un pensionnaire dont j'ai essayé de sauver la vie mais qui est mort dans un gargouillis de sang sans que je ne puisse rien faire. Je vois mes amis tomber les uns après les autres sans que je ne puisse rien faire. Et pourtant, les larmes ne viennent pas. Je suis trop horrifiée, trop énervée pour comprendre, pourquoi est-ce à nous de payer le prix ? Je n'ai rien demandé à personne moi ! Je n'en veux pas de cette vie, j'ai pas envie de mourir pour cette mascarade !

Je reviens dans mon corps, j'ai si froid, si mal à la tête, je ne m'empêche pas de pleurer.

"Je ne peux, Maman, pitié que ça s'arrête."

Code by Sleepy

Des larmes coulent sur le visage encore enfantin de Sora, mouillant ses joues et les teintant de rouge. Neven détestait la voir pleurer par-dessus tout. Et savoir que c’étaient, en quelque sorte, les mots qu’elle venait de prononcer qui la mettait dans un état pareil lui brisait le cœur. La vérité blessait, bien plus tranchante que la lame d’un couteau.

« Ma vie sera toujours un enfer et le sera toujours. Je n'ai le droit que de mourir pour la gloire des dieux, si ce n'est pas le cas, je serais considérée comme une traîtresse qui subira le châtiment des Bienveillantes pour le reste de mon existence. » Dit-elle en baissant la tête, sur le ton de l’aveu.

Neven hausse un sourcil. C’est un discours qu’elle a entendu de nombreuses fois – de la bouche de demi-dieux ayant ensuite rejoint le camp de Cronos, quand celui-ci cherchait à renverser une nouvelle fois les Olympiens. Mais de la bouche de Sora…

« Je n'ai pas envie de les servir, je n'ai pas envie d'être un héros, je veux choisir ma vie et ce n'est pas celle-là Maman. J'ai tellement souffert de mon père qui n'a jamais eu un mot pour moi, j'ai souffert de perdre ma mère biologique et de sa famille au Japon, de perdre Pandore, de mes amis. Je ne le supporte plus, j'entends leurs voix qui résonnent en permanence, leurs cris d'agonie Maman. Je ne veux plus les entendre, même si je dois en payer le prix un jour, je ne veux plus, non. Je ne peux plus. »

Elle prend sa tête dans sa main, tremblante comme une feuille. Neven pince les lèvres et, du bout de ses doigts, envoient quelques étincelles de lumière en direction de sa petite fille. D’un côté, elle comprenait ce sentiment d’amertume vis-à-vis des dieux. A qui devait-elle son exil sur Terre et tous les problèmes qu’elle y avait rencontrés ? Bien sûr qu’elle avait manqué de responsabilité en fuyant ses tâches pour découvrir le monde mortel. Mais la décision de la renvoyer de l’Olympe avait été prise par les dieux. Si elle avait mal supporté cette décision de l’Olympe, comment devaient supporter les sangs mêlés d’être constamment manipulés par ceux-ci, sans jamais recevoir l’attention nécessaire de leur parent divin ?

« Je ne peux, Maman, pitié que ça s'arrête. » Supplie Sora, sans s’arrêter de pleurer.

« Ce n’est pas aussi facile que ça, ma chérie… » Murmure la nymphe, la gorge nouée. « Mais tu peux faire de ton mieux. Regarde déjà tout ce que tu as accompli : tu es devenue une femme forte et libre, tu as appris à aimer et à être aimé. Combien de demi-dieux peuvent prétendre en avoir accompli autant ? La plupart se contentent de leur sort, sans jamais essayer de vivre. Mais toi, tu as une richesse de cœur dont tu n’as pas conscience. Et tu es plus, tellement plus que la simple fille d’un dieu grec. »

Elle esquisse un petit sourire, s’empêchant de laisser une autre larme. Elle devait se montrer forte, pour justifier la vigueur de ses propos, prouver qu’elle y croyait de tout son cœur. Et par-dessus tout, elle le devait pour Sora, pour lui montrer qu’elle n’avait pas à craindre de vivre dans ce monde toute seule.

« Je ne peux pas t’empêcher d’aimer Clayton, même si le danger auquel tu t’exposes me terrifie. Tout ce que je peux te souhaiter, c’est d’être heureuse avec lui le plus longtemps possible. Fais de ton mieux Sora et peut-être que les dieux te récompenseront en te laissant tranquille. C’est tout ce que je veux pour toi. Te voir grandir heureuse. »

Sujet: Re: Come as you are ~ ft Sora (terminé)