Keziah avait besoin d'un verre. Ou d'une bouteille entière. Si il y'avait bien quelque chose où elle était passée maitre, c'était l'art de boire pour oublier ses problèmes. Et depuis la mort de son père, sa vie n'était qu'un tas de problèmes empilés les uns sur les autres. Elle avait réussi à tenir le coup jusque-là, tentant de se concentrer seulement sur l'éradication de ces monstres. Mais voilà, Keziah n'était qu'une mortelle et parfois, les mortels craquent. Surtout quand ces mortels n'ont pas dormi depuis 3 jours.
Tout avait commencé avec sa rencontre avec Morphée, le dieu des rêves. Un sale enfoiré, ouais. Keziah avait à tout prix voulu ajouter le dieu sur son tableau de chasse mais la jeune chasseuse s'était attaquée à plus fort qu'elle, et résultat, le marchand de sable lui avait filé entre les doigts. Elle s'attendait bien à une sorte de vengeance de la part de Morphée, mais jamais elle n'aurait imaginé ça. Cauchemars terrifiants, insomnies incessantes, le dieu avait choisis des représailles beaucoup plus violentes que n'importe quel coup de poing. Elle ne dormait plus, et les rares fois ou elle fermait les yeux, des images atroces venues tout droit de son passé l'assaillait. Oh, si jamais elle  le revoyait, il allait payer le cher Morphy.
Le visage cerné et les mains tremblantes par tout les cafés qu'elle consommait, Keziah entra dans son bar habituel, saluant au passage le gérant d'une une poignée de main virile. On était loin des bars branchés de Manhattan et c'était justement ça qu'elle aimait. Pas de chichis ici, c'était un repère de bikers bodybuildés, d'anciens prisonniers et de pleins d'autre gens tout aussi peu fréquentables. Elle s'asseya au bar, et commanda un whisky sec. Certes, boire jusqu'a l'oubli n'allait pas résoudre ses problèmes, mais ça lui ferai un bien fou. Elle oublierait le monde mythologiques et toutes les emmerdes qui vont avec. Et surtout, elle oublierai Clayton. Oui, des fois, l'oubli restait la meilleure des solutions.  
Plus les verres passaient, plus Keziah se métamorphosait. Ce n'était plus la jeune femme aggressive au gros baggage émotionel mais une une jeune femme souriante et pleine de vie, croyez le ou non. Elle était complétement soule, et comme une partie de la population, Keziah quand elle est soule, elle drague. Bon, malheuresement ce soir là, les clients du bar n'avait visiblement pas étés gatés par la nature, aucune proie potentielle à l'horizon . Elle soupira et avala ce qui lui restait dans son verre, d'une seule traite. Ce n'était visiblement pas ce soir qu'elle rencontrerait l'homme de sa vie.

« Bonsoir, mademoiselle. Je vous offre un verre ? »

La chasseuse sursauta. Elle n'avait pas vu l'homme arriver derrière elle, et se retourna pour voir à qui elle avait à faire. Glups. Dire qu'il était beau serait un euphémisme, on aurait dire qu'il avait été façonné par les Dieux. Si on était dans un dessin animé, la langue de Keziah aurait pendu et des petits coeurs se serait formés dans ses yeux; mais dans la réalité, Keziah se contenta de bégailler.

« Je... Si, si vous voulez...

C'était ridicule, et ça ne lui ressemblait pas du tout. Au fond d'elle, la Keziah sobre explosait de rage et de honte.

« Qu'est ce que vous faites dans ce genre d'endroit ? Je ne vous ai jamais vu avant...»

Bon, cette phrase n'était guère mieux mais au moins, elle enlevé son air niais de son visage. Et puis, c'etait vrai qu'est ce qu'un gars comme lui faisait ici ? Qui étais-il d'abord ?

Elle avait comme un air de déjà-vu, comme si quelque chose dans les yeux bleus magnétique de l'inconnu lui rappelait quelqu'un. Pourtant, elle avait beau chercher dans son cerveau embrumé par les vapeurs de l'alcool, aucun nom ne lui revenait à l'esprit. Si seulement elle s'était fié à son instinct de chasseuse, et pris ses jambes à son cou... Mais cela aurait été une autre histoire, beaucoup moins intéressante  que celle qui se déroule devant nos yeux.

« J’étais là dehors, et je vous ai vu. Il me semblait alors inconvenant de vous laisser vous, entourés de pareils laiderons. »

Elle ria intérieurement. C'était quoi ce mec ? Qui parlait encore comme ça au XXI ème siècle ? Surtout avec autant de niaiserie. Normalement, elle aurait dû lui donner un bon coup pied de fesses pour en faire sortir le balais coincé dedans, elle aurait dû se payer sa tête et partir en lui lassant payer l'addition. Elle n’aurait jamais laisser un bouffon pareil lui adresser la parole. Autour d'eux, les regards se faisaient inquisiteurs, et jaloux. Depuis qu'elle venait ici, elle avait déjà envoyé quatre types à l'hôpital pour avoir essayé de l'amener dans un recoin sombre du bar. Et elle avait tordu le poignet d'un autre qui lui avait mis la main au fesses. Depuis, les autres hommes se tenait en retrait, terrorisés. Voir l'intouchable Keziah se faire ainsi approcher par un inconnu semblait en énerver plus d'un. Elle se pencha, et murmura dans l'oreille de celui qui venait de lui payer un verre.

« Si j'étais vous, j'éviterais de faire trop le malin ici dit-elle avec un sourire malicieux. Les laiderons ont l'air plutôt remontés contre vous »

Keziah avala son verre d'une seule traite. Ok, là elle était officiellement soule. Elle qui ne supportait pas de se faire draguer, semblait apprécier le manège de l'inconnu. C'était donc comme ça que les filles normales passaient leur soirées ? C'était pathétique. Keziah était pathétique.

« De plus, bien que votre beauté m’éblouisse, vous me semblez malheureuse et s’il y a une chose que je ne supporte pas, c’est de voir une fille telle que vous malheureuse. Vous savez, si vous avez besoin de parler plus tranquillement, ma chambre d’hôtel n’est qu’à deux pas d’ici…»

A ces mots, Keziah perdit tout sourire. Pour être malheureuse ça elle était, elle l'avait toujours été d'ailleurs. Le malheur était devenue comme un manteau collé à sa peau, dont elle ne pouvait se débarrasser. La dernière fois qu'elle avait été heureuse était lorsqu'elle avait huit ans, quand elle se tenait encore dans les bras de sa mère, quelques jours avant qu'elle ne meurt, ensuite ce ne fut qu'une longue chute jusqu'aux Enfers. Et là, il se passa quelque chose d'incroyable. Quelque chose que personne ne pensait possible. La jeune femme se mit à pleurer. Ce n'était pas des gros sanglots tonitruants mais il y'avait bien deux larmes qui perlait le long de ses joues. Après le bégaiement, voilà qu'elle pleurait. Décidément, cette soirée ne pouvait pas empirer. De sa main tremblante, elle essuya ses yeux. L'alcool était vraiment une arme destructrice, faisant ressortir toutes les pires émotions. Keziah ne pleurait jamais, elle se l'était interdit. Elle se dégoutait, avait-elle touché le fond si bas qu'elle pouvait pleurer en présence d'inconnus ?  Elle tenta de reprendre un air plus dangereux, plus fier, mais sa voix restait tremblante, fluette.

« Sortons d’ici.  »

S'il vous plait, faites moi ressentir autre chose que cet insupportable mal-etre. Faites moi vivre.