Il n’y avait pas grand-chose à dire. Matthew venait enfin de se prendre un râteau en bonne et due forme. Un râteau. Comme si ce mot qu’utilisait les adolescents pouvait qualifier sa relation avec Pandore. Mais oui, il lui avait tout avoué et elle l’avait rejeté. Donc oui, on peut dire que c’est un râteau. Et ça faisait mal. Mais ce qu’il n’expliquait pas, c’est comment elle avait su pour Megara. Cette question le hantait et aucune explication logique lui permettait de comprendre.

Mais si Pandore est courant, Alice l’est aussi. Alors, il ne fut pas plus surpris que ça quand un des Résistants lui dit que la fille d’Hadès l’attendait dans les cuisines. S’il trouvait son comportement justifiable vis-à-vis de Pandore, il se sentait vraiment coupable pour Alice. Alors, il s’y rendit, le cœur lourd. Il s’arrêta devant elle et ne put que constater l’ampleur des dégâts quand il croisa son regard vide. Il s’approcha d’elle, prêt à encaisser les coups, les cris et les larmes. Il s’adossa au meuble contre lequel elle était appuyé et il lui dit doucement.

- Il y a longtemps, je suis tombé amoureux. C’était la deuxième fois que ça m’arrivait, mais ça n’avait rien avoir avec la première. C’était plus brusque. Plus fort. Et j’ai détruit cette fille. Vraiment. Puis, récemment, j’ai foiré avec la troisième fille dont je suis tombé amoureux. Et en beauté. Le pire c’est que c’est l’amour de ma vie. J’étais au fond du trou. J’ai tellement bu qu’un soir quand je suis tombé sur la deuxième fille, celle que j’avais détruite, j’ai couché avec elle. Il y avait tellement de haine, cette nuit-là.

Il se tourna vers son amie et acheva son explication.

- Alice, ce soir-là, je n’ai pas couché avec Megara, l’amour de ta vie. J’ai couché avec Megara, la fille dont j’étais désespérément amoureux, il y a des années. Ça n’avait rien avoir avec toi. Et je te jure sur le Styx que je m’en veux vraiment et que je suis désolé.

Un silence de mort s’abat sur eux, comme si Alice réfléchissait aux paroles de Matthew. Pourtant, il savait que ça ne suffirait pas à apaiser sa colère. Aussi quand elle se décolla du meuble pour lui faire face, il s’attendit à de la colère.  A beaucoup de colère.

- Je... je comprends...

Matthew fronça les sourcils et attendit la suite. Ce n’est que lorsqu’il remarqua le tremblement de ses mains, qu’il comprit que ça allait dégénérer. Les portes des placards commencèrent à s’ouvrir doucement.

- Et moi aussi je suis désolée...

Matthew fut soudain projeter sur le sol, par les ombres d’Alice. Il atterrit brutalement et sentit que les emmerdes débutaient à peine. Elle s’approcha de lui alors qu’il se redressait en se frottant le crâne douloureux.

- Moi aussi je suis désolée, désolée de te donner une mort lente et douloureuse !

Il fut soulevé du sol et il regarder son amie qui le dévisageait avec rage. Il sentit les ombres d’Alice lui enserrer le coup, le privant d’air. D’autres viennent lui serrer les bras et il ne put décrocher son regard de la fille d’Hadès, malgré les objets qui volaient autour de lui. Des Résistants entrèrent et Alice les envoya valser. S’il n’était pas en si mauvaise posture, il l’aurait bien sermonnée sur sa façon de traiter les autres. Elle lui enfonça ses ongles dans le menton, y laissant sa trace et des gouttes de sang tombèrent bientôt sur le sol.

- Si je n'aimais pas Pandore autant que toi je peux te jurer que je l'aurais tué sous tes yeux pour te faire souffrir autant que j'ai souffert !

Matthew ne répondit rien. Il ne pouvait pas articuler un mot et l’air commençait à lui manquer. Par ailleurs, il savait qu’Alice ne toucherait jamais un cheveu de Pandore. Des taches noires commençaient à danser devant ses yeux et des bruits d’insectes se firent entendre. Puis, il retomba sur le sol et prit une gifle ce qui eut le don de le ramener à la réalité. Il prit plusieurs bouffées d’air et laissa Alice parler.

- Comment t'as pu me faire ça espèce de co****d ! T'as beau juré ce que tu veux sur le Styx je m'en fou ! Tu souffrais ? bah moi aussi j'ai souffert et je n'aurai jamais pu te faire ça ni à toi ni à Pandore ! Tu savais très bien ce qu'il en était ! Tu m'as vu pleurer devant toi, tu m'as écouté quand je n'allais pas bien à cause d'elle ! Alors plus que quiconque tu n'avais pas à faire ça ! Tu t'en veux ? Pff et alors ?!

Légèrement soucieux de se reprendre une raclée, il la regarda longuement avant de dire :

- Et alors, je viens de m’expliquer. De toutes manières, tu ne t’es pas dit que toi et Megara ça ne colle pas ?

Il avait beaucoup réfléchi à ça, ces derniers temps. A sa nuit avec Megara, puis à sa relation avec Alice. Il en était venu à la tragique conclusion que leur relation était vouée à l’échec. Megara devait d’abord affronter tous ses démons et elle devait le faire sans Alice. Il fallait que son amie le comprenne pour pouvoir avancer.

- Megara et toi ? Peut-être que c’est voué à l’échec… Je ne dis pas ça parce que j’ai couché avec elle, Alice. Ni parce que tu viens de manquer de me tuer. Mais j’ai réfléchi. Peut-être que c’est juste pas le bon timing. Ni pour toi, ni pour elle. Laisse-la partir. Oublie-la et trouve-toi quelqu’un qui ne te fera pas souffrir !

Il soupira, conscient que ces paroles peuvent avoir l’air dures. Mais, il lui veut réellement que du bien. Il essuie le sang de son visage, un peu plus fermé.

- Quant à Pandore, ce ne sont pas tes histoires. Elle et moi, on a rompu et donc, plus rien à faire ensemble. Je peux coucher avec la Terre entière que je n’aurais pas à me justifier auprès d’elle !

Alice brulait de haine. Matthew savait qu’elle pouvait haïr avec force mais jamais ça n’avait été contre lui. S’il savait le mériter, il ressentait un petit pincement au cœur. Il savait que leur amitié était terminée. Ou du moins pour l’instant. Il le savait. Il le lisait dans son regard. Et alors qu’il pensait que rien ne pouvait être pire, sa meilleure amie, ou du moins son ex meilleure amie, l’acheva.

- Je vais essayer d'oublier ce que tu viens de me dire à propos de Meg, mais pour Pandore je te prie de me croire que si c'est mes histoires ! Tu la fous enceinte pis tu te…

Matthew essayait de se concentrer sur les lèvres d’Alice qui bougeaient avec véhémence. Il essayait de comprendre ce qu’elle disait pour pouvoir penser que la terreur qui le paralysait. Autre chose que la nausée qui lui retournait l’estomac. Non. Non. Pandore avait beau le détester, jamais elle ne lui ferait ça. Jamais elle ne le trahirait en lui cachant l’existence de leur enfant. Jamais. Alors pourquoi est-ce qu’il se sentait aussi mal ? Parce que c’était la vérité et qu’il le ressentait jusqu’au plus profond de ses tripes. Alice avait disparu mais lui, il ne voyait plus que l’atroce vérité.

Il allait être père et Pandore ne voulait pas de lui dans la vie de son enfant.