Le pire de tout dans un bar, c'est de boire seul, et surtout quand des idées vous tortures l'esprit. Morigan n'avait pas pu réquisitionné Cal, le fils d'Hermès étant occupé à X ou Y chose. Il était son seul compagnon de galère, la seule personne qui fréquentait régulièrement les bars de New-York. Effectivement, il y avait Neven aussi. Morigan y avait pensé, mais avec elle il préférait diminuer le débit de boisson plutôt que autre chose. Il se retrouvait donc accoudé au comptoir d'un bar qu'il ne connaissait pas encore. Il était plutôt sympathique, l'ambiance assez calme pour broyer du noir, et assez confortable pour soulager ses muscles courbaturés de ses dernières mésaventures. Son emprisonnement au QG de la résistance s'était terminé il y a peu à son grand bonheur. Le fils de Léthé avait passé quelques temps comme le reste de ses camarades, à l'infirmerie de la Colonie. Il avait reçu beaucoup d'attention, de soins. Certains des pensionnaires étaient passés prendre de ses nouvelles, ainsi que donner leurs condoléances pour Jake, son petit frère lâchement assassiné le jour même de la libération. Autant dire que l'ambiance était à son comble, tout comme son humeur. L'alcool était interdite à la Colonie, bien que de petits trucs circulaient, notamment grâce aux enfants de Dionysos. Rien de très folichon.
Ainsi, Morigan avait finit là, assis mollement sur sa chaise, fixant sa bouteille de bière, une vieille copine. Toujours de la bière, toujours et encore. Il s'était juré de ne jamais toucher au whisky. Ça, c'était son père, et ça s'était tout aussi dégueulasse. Dans un autre registre, la bière était immonde. Le demi-dieu détestait l'alcool, ça le rendait malade. Et lui qui espérait tout oublier en buvant ! Morigan eut un sourire moqueur pour sa propre pensé. Il était le fils de l'Oubli, il n'oubliait jamais rien. Qui plus est, il avait ses propres souvenirs, mais également ceux de bien d'autres. Morigan soupira et but une autre gorgée de bière. Par curiosité, il balaya des yeux l'intérieur du bar. Aux tables, on trouvait les groupes de potes, ceux qui riaient, jouaient, discutaient. Ceux qui se détendaient après une bonne journée de boulot. Au comptoir, flirtaient les couples, ou comme lui, certains broyaient du noir. Dieux qu'il aimait les bars ! Un petit coin de paradis ...

Les yeux de Morigan s'arrêtèrent sur une jeune femme assise non loin de lui. Elle était visiblement seule, et son élégance contrastait avec le lieu. Le fils de Léthé fronça les sourcils, se demandant ce que cette charmante personne faisait là. À vrai dire, cela l'intriguait.
Accompagné de sa bière, Morigan jeta à nouveau quelques coups d'œil à la jeune femme, se demandant comment l'aborder, un peu comme un gosse qui cherche à demander quelque chose à ses parents en sachant très bien qu'on allait lui refuser. Grimaçant, fronçant les sourcils tout en fixant sa bière (comme si elle allait lui répondre tiens !) en se demandant ce qu'il pourrait bien dire afin de démarrer une quelconque conversation. Finalement, il soupira et se décida subitement.
Morigan se rapprocha de la jeune femme, lui souriant pour la saluer. Après deux ou trois gorgées de bière, il se pris (enfin) la parole.

"Vous savez, c'est pas la meilleure chose à faire, de boire seule."

Intérieurement, il se maudit. Il aurait au moins pu trouver autre chose à dire.

"Oui allez y vous... vous pouvez oui."

Le fils de Léthé réprima avec bien du mal de sauter de joie lorsqu'il entendit sa réponse. Toujours avec son éternel sourire, il s'assit en face de la jeune femme avant de poser sa vieille compagne de galère là où il le pouvait (la table était remplie de document, et Morigan ne voulait nullement nuire au travail qu'effectuait la demoiselle), certain que la bouteille de bière ne le rejoindrait pas de si tôt. Et les yeux du demi-dieu s'attardèrent un peu plus sur celle qui lui faisait face. C'était drôle, elle semblait avoir perdu tout l'assurance qu'elle avait avant qu'il vienne l'aborder. Lorsqu'elle était seule, elle affichait l'assurance d'une femme forte et indépendante. Morigan avait l'impression que sa venue avait abaissé toutes ses "défenses". Ses joues rosissaient (et même rougissaient) alors qu'elle essayait de le cacher. Chose perdue, ses petits toussotements trahissaient le fait qu'elle essayait de reprendre une certaine constance. C'était ... attendrissant.

"Vous... enfin je... je m'appelle Skyler, et... et vous ?"

Skyler. Un nom peu commun, un nom sympathique. L'Irlandais aurait voulut poser sa tête sur ses bras croisés et simplement la regarder en répétant son nom intérieurement. Non mais quoi ? Il était gaga ? A croc ? Il venait simplement de la rencontrer et pourtant il ne voulait plus la quitter, voire même la serrer dans ses bras afin de la réconforter. Skyler semblait mal à l'aise, stressée. Pourquoi ? Est-ce que c'était lui qui la mettait dans un état pareil ? Ou alors ... est-ce que l'une de ses fichues réminiscences avait prit le dessus sans qu'il ne s'en rende compte ? Et il l'intimidait en faisant n'importe quoi ... Sauf que non, cette fois-ci il en était sûr, c'était bien réel. Le demi-dieu se contentait de la fixer avec des yeux doux, un sourire à la limite du béat qui devait le rendre ridicule. Enfin, lorsqu'il se rendit compte qu'un certain moment était passé depuis que la jeune femme lui avait posé une question. Il se racla la gorge et redressa le dos, se ressaisissant.

"Je m'appelle Morigan. Enchanté de vous connaître !"

Et énième petit sourire.
Les yeux de Morigan se posèrent sur les documents qui tapissaient légèrement la table.

"Ça fait beaucoup de paperasse pour un endroit pareil. D'ailleurs, je suis curieux, dans quoi travaillez-vous ?"

Le visage de Skyler était un vrai dégradé de rose et de rouge, et ce certainement jusqu'à la racine de ses cheveux. Si elle faisait tout pour cacher son malaise, c'était raté. Mais qu'importe, ce n'était pas le but de Morigan de la mettre dans l'inconfort. Il espérait pouvoir détendre l'atmosphère afin qu'elle se sente mieux.

"Oh eh bien je... à vrai dire je suis avocate, et...là ce sont des papiers pour une affaire en cours, mais j'ai finis, peu de temps avant que vous ne veniez me... me voir."

Morigan murmura un "oh" d'admiration, son regard soudainement attiré par la paperasse sur la table. Avocate, elle était avocate. Quand il était gamin, Morigan voulait défendre les gens, la population.
S'il avait été plus studieux à l'école, il aurait très certainement bien pu avoir un tel métier. Malheureusement la tant appréciée (ironie ici, évidemment) dyslexie des demi-dieux l'en empêchait.
Et à l'époque, la seule filière qui s'ouvrait à lui avec son piètre parcours scolaire était l'armée. Il ne regrettait pas, même avec ce qui lui était arrivé.
Un raclement de gorge le fit sortir de ses pensées, et son attention se retourna vers Skyler.

"Morigan c'est... c'est original comme prénom, c'est beau..."

Autre sourire se dessinant sur les lèvres du fils de Léthé, lequel passa une main derrière sa nuque et senti ses joues rosir sans qu'il ne puisse dire pourquoi. En cet instant, il se sentait tel un gamin. Lui même se raclât la gorge, histoire de reprendre ses esprit.

"Ce...c'est de quelle origine ?"

Skyler se rabattit sur son thé, on aurait dit qu'elle essayer de se cacher (ou plutôt cacher ses joues rouges) derrière la tasses. Bizarrement, ça lui donnait encore plus un air attendrissant, l'une de ces mimiques qui donnait envie à Morigan de la serrer dans ses bras, bien que cela puisse paraître totalement déplacé face à une inconnue. Mais qu'importe, c'était un petit truc au coin du coeur qui le poussait à faire une telle action. Le demi-dieu se reteint, ce n'était pas vraiment le moment.

"C'est Irlandais. Je suis né en Irlande, plus précisément à Wicklow. Et Skyler ? C'est ... ?"

Son regard interrogateur était curieux de l'origine de ce prénom. Il avait beau réfléchir, ça ne lui disait rien. Enfin, il était sûr d'une chose, ce n'était pas Américain.

"Mais... dites moi si ce n'est pas...indiscret... que faites-vous vous ?"

Ah. La fameuse question. Morigan n'aimait pas mentir, mais là, il était obligé. Généralement il essayait de faire quelque chose d'assez semblable. S'il disait aux gens qu'il était sentinelle dans un endroit regroupant les gamins des dieux grecs, il risquait de retourner à l'asile. C'était relativement problématique.

"Je suis surveillant dans un internat."

Il n'y avait rien de palpitant dans cela comparé au métier d'avocat. La plupart du temps c'était la routine, mais il fallait bien que quelqu'un protège les sangs-mêlés, ceux qu'il considérait comme sa famille. Le camps était une sorte d'internat, c'était vrai, mais un drôle d'internat.

Pour vous répondre, Skyler ne vous renseignera pas beaucoup sur mes origines, mais si je vous dis McLiven vous devriez avoir un plus gros indice.

McLiven. Effectivement si son prénom ne donnait aucune indication concernant son origine géographique, son nom de famille renseignait plutôt bien. Le Mc était typique, et il aurait fallut être totalement stupide pour ne pas savoir d'où elle venait.

Eh oui... une authentique écossaise. Nous n'étions finalement pas si loin géographiquement déjà à l'époque.

Écossaise, elle était écossaise. Ils étaient presque voisins à l'époque, sans le savoir. Un énième sourire s'étira sur les lèvres du fils de Léthé. Les Irlandais et les Ecossais étaient connus pour ne pas s'entendre, une vieille querelle du passé qui avait encore des répercutions sur le présent. Et lorsque le fils de Léthé regardait Skyler, il trouvait ce conflit totalement ridicule. Les Scottish n'était pas si mauvais finalement. Il suffisait de regarder celle qui se tenait devant lui, charmante demoiselle dont il aurait pu passer tout une journée simplement à la regarder sans que celui ne lui pose aucun problème. Et même les changements de couleurs de sa peau, passant du petit rose au rouge cramoisi, l'attendrit. Au premier abord, du haut de sons statut d'avocat et de son caractère qui semblait fort, Skyler semblait être une femme inébranlable. Morigan avait-il percé sa coquille ? A en juger l'apparition rapide de fraises d'un rouge délicieux et les fleurs qui revivaient un peu partout dans l'établissement, il était clair que quelque chose se passait. Mais le fils de Léthé n'y fit pas attention, trop occupé par la jeune femme, et ce ne serait pas cette fois qu'il se rendrait compte de son identité semi-divine. Une autre fois peut-être, mais en ce moment ce n'était pas la question.

"Tout va bien Skyler ?"

Il avait prit la liberté d'être un peut plus familier, passant du vous à une esquisse de tutoiement passant pas l’énonciation de son prénom. Devant lui, la jeune femme semblait étouffer, perdre ses moyens. L'instinct du demi-dieu lui soufflait d'agir, de faire quelque chose. Doucement, donc, il posa sa main sur la sienne. Il se voulut rassurant, et le contact fut doux, réconfortant. Quoi qu'il se passait en ce moment, il voulait son confort plus que tout.

  Devant lui, face à ce contacte direct, Skyler semblait presque des moyens bien plus qu'il n'aurait voulut. Morigan ne savait vraiment pas ce qu'il se passait en elle (et le dieux seuls savent combien il était curieux de savoir), mais il ressentait une forte tension, pas si désagréable que cela. Elle le dévorait des yeux, ça il en était conscient, mais elle semblait vouloir exploser, libérer toute tension dans son corps. Le fils de Léthé avait déduit cela par la propre expérience qu'il vivait au moment présent. Dans sa poitrine, son coeur battait la chamade.
  Ils étaient là, au milieu d'un bar, au milieu du raffut des verres qui s'entre-choquent, claquent sur les tables, des toux provoquées par le tabac, des éclats de rires, des paroles trop fortes comme celles chuchotées. Et eux, ils avaient en peu de temps créé leur propre bulle de confort, insonorisée, consciente du lien qui reliait les jeunes gens. Autour d'eux, c'était un peu comme un vide serein, confortable.

"Je..."


  Morigan haussa un sourcil. Elle perdait son assurance, comme mise à nu. S'en était quelque peu comique, avec ses joue rougies. Même elle riait, bien que l'Irlandais doutait grandement que ce soit pour un quelconque amusement. Lui garda le sourire qu'il avait aux lèvres, ne la quittant pas du regard.

"Pfiou... désolée... je... c'est simplement que je me sens bête de réagir ainsi face à vous. Enfin tu ? Enfin je.. on peut se tutoyer non ?"

  Comment ça bête ? Comment pouvait-elle se trouvait bête ? Sa réaction était mignonne, presque enfantine. Il voulut lui souligner mais elle reprit :

"Morigan vou... tu veux m'accorde une seconde s'il te plait ?"

  Et l'instant d'après, elle était partie.
  Morigan souffla et se détendit sur sa chaise. Devant lui, ne restait que sa bouteille de bière, vieille compagne qui fut effacée pendant un instant par la simple présence de la jeune femme. Il bu une gorgée qui ne lui parut bien moins amère que précédemment. En fait, il n'y faisait plus attention, l'esprit trop embué par Skyler. C'était une drôle de jeune femme d'ailleurs, si forte au premier abord mais qui changeait du tout au tout lorsqu'elle était déstabilisée. Un drôle de personnage que le fils de l'Oublie ne pouvait s'empêcher d'apprécier, et même peut-être un peu plus. Il était tôt pour savoir vraiment ce qu'il ressentait.
D'un geste de la main, le demi-dieu commanda la même chose pour le duo. Un thé pour elle, une bière pour lui. Avec le temps, il s'était largement familiarisé avec les habitudes et le "langage" de ces endroits. Morigan finit le reste de sa boisson, un peu cul-sec, tout en sachant très bien qu'il le regretterait demain, surtout d'en prendre une deuxième. Mais qu'importe, puisque cette journée était accompagnée d'un agréable moment.

Le moment sembla long avant que Skyler ne revienne à la table. Il la laissa s'installer, ne pouvant s'empêcher de la regarder à nouveau en détail. Quelque chose avait changé. Elle ... s'était maquillée ? C'était léger, mais visible. Pas si artificiel que cela, comme on pouvait bien trop souvent le voir. Elle l'avait fait ... pour lui ?

"Bref nous disions ? Ah oui ! Oui je suis écossaise du coup, mais ce n'est pas parce que nos pays d'origines ne s'aiment pas que cela ne peut être le cas entre nous."

Elle sourit, puis sembla regretter ce qu'elle venait de dire, tandis que Morigan apprécia ce qu'il venait d'entendre. Mais elle se reprit tout de même.

"Enfin je veux dire que nous ne sommes pas obligés de nous détester comme nos pays."

Morigan hocha la tête et sourit à nouveau (ou devrais-je dire encore ?). Mine de rien, Skyler venait de donner le fond de sa pensée : ils pouvaient s'entendre et fonder un lien.

"Evidemment, répondit le demi-dieu tout sourire."

Il marqua une simple pause avant de reprendre :

"Je me suis permis de commander à nouveau. J'ai prit la même chose."

Le fils de Léthé lui sourit à nouveau. Il voulait relancer la conversation, mais sur quoi ? Demander des informations personnelles aurait pu être trop intrusif, et c'était bien quelque chose qu'il ne voulait pas. Il avait peur qu'elle parte de suite, qu'elle le fuit, qu'elle se sente agressée.

"Alors dis moi ... tu as toujours voulut être avocate ?"

Morigan porta le verre de à ses lèvres, buvant une gorgée. Ses yeux ne se détachaient pas de Skyler en face de lui qui cherchait qui lui répondre. Enfin, elle dit :

"Alors... Si tu considère les rêves de petites filles comme une réelle volonté alors j'ai d'abord voulu faire présentatrice météo..."

Un large sourire se dessina sur les lèvres du fils de Léthé, amusé. Bien sûr les rêves d'enfants comptaient, dans leur innocence ils étaient les mêmes rêves que certains adultes faisaient.

"Je voyais ces belles dames à la télé qui nous annonçaient la météo des jours à venir et je trouvais ça presque comme de la magie. C'est idiot n'est-ce pas ? Car après tout ça n'a rien à voir avec des dons de voyance, c'est juste de la science."

Morigan l'écoutait, un éternel sourire aux lèvres alors qu'elle lui racontait ses rêves d'enfants. Si seulement elle savait que tout n'était qu'en fait qu'une sorte de magie ...

"Mais sinon après je ne savais pas trop quoi faire, je n'étais pas très populaire au collège et lycée. J'avais quelques copines mais j'étais assez discrète et je n’intéressais pas plus que ça les garçon, alors j'ai vite dévoré bon nombres de bouquins. D'abord des romans, puis ce fut des livres parlant de tout et rien: j'en ai lu sur l'astronomie, sur la cuisine, sur les voitures et j'en passe. Et un jour je suis tombée sur un livre parlant de diverses affaires de justices. J'ai alors commencé à en lire de plus en plus sur les affaires policières, et mes romans devinrent des polars. Et quand je dus choisir la filière, je me suis lancée dans le droit. Je voulais pouvoir faire quelque chose de bien et de juste. Et même si encore aujourd'hui plus qu'avant je me rend compte que notre système est loin d'être parfait, on peut quand même rendre une certaine justice avec ce dernier."

Le droit était donc une vocation pour elle, quelque chose dont la jeune femme s'était plongée par curiosité puis par passion par la suite. Il semblait émaner d'elle une grande détermination, un peu comme une envie de changer le monde, changer la justice. Morigan hocha légèrement la tête. Il n'avait jamais trop été au cœur de cet univers mais il avait vu de nombreuses injustices qui n'auraient dues avoir lieu durant ses années comme soldat.

"Désolée je parle beaucoup... Mais pour te répondre je n'ai pas toujours voulu faire ça mais j'ai quand même vite su que je voulais me rendre utile à notre société d'une manière ou d'une autre, et c'est dans le droit que j'ai vu cette opportunité."

Énième hochement de tête compréhensif de la part du fils de Léthé avant qu'il ne suive l'exemple de Skyler, prenant une autre gorgée de bière. Elle ne l'ennuyait pas, bien au contraire, et parler avec une personne ordinaire lui faisait un bien fou. Puis la jeune femme reprit :

"Mais toi Morigan, tu ne m'as pas dis ce que tu fais dans la vie ? Parce que je parle je parle mais j'aimerais aussi en savoir plus sur toi moi !"

Un infime moment, les doigts du demi-dieu se crispèrent sur le verre. Il esquissa un sourire léger, cherchant intérieurement ce qu'il allait dire. Hors de question de lui servir le plus gros baratin de l'univers, hors de question de lui dire la vérité (évidement) sur le monde auquel il appartenait ni sur l'intégralité de sa vie qui n'a jamais été totalement rose.

"Hm, quand j'étais gamin je voulais garder les troupeaux de moutons, pas du tout pompier ou explorateur comme d'autres enfants de mon âge ! (il eu un petit rire avant de reprendre). Mes parents et moi sommes partis en Amérique où j'ai découvert un tout autre monde que l'Irlande. J'ai grandi, changé et je me suis rendu compte que je pouvais devenir bien plus utile que je ne l'étais, je voulais aider les gens. Du coup, quand j'ai pu, je me suis engagé dans l'armée au grand dam de mon père."

Morigan passa volontairement sous silence le triste sort de sa mère. Il but un peu de bière puis continua :

"J'y suis resté un bon bout de temps avant d'être blessé. A partir de ce moment-là, j'étais incapable de retourner au combat et il s’est passé un bon bout de temps avant de chercher un nouveau boulot. J’ai trouvé complètement par hasard mon boulot : surveillant dans un internat. C’est plutôt tranquille, les gamins sont sympas et ne font pas trop de grabuge. C’est un boulot qui me plait. »

Le fils de Léthé sourit à la jeune femme devant lui. Il ne lui avait pas menti, lui cachant juste quelques points de sa vie. Si elle s’était confiée rapidement à son sujet, lui n’était pas prêt à faire une telle chose, et certainement pas vu la vie qu’il avait mené après avoir congédié de l’armée.

Son verre de bière quasi vide, les yeux de Morigan s’attardèrent sur sa montre et il fronça instantanément les sourcils.

« Excuse-moi, je vais devoir te laisser. Si l’envie te dit, on pourrait se revoir un de ces jours, pourquoi pas ici, mais sa la paperasse … ? »

D’un geste vague, il désigna les dossiers laissés sur le côté de la table. Morigan insista pour payer pour le duo, puis avec un énième sourire il quitta Skyler et l’endroit par la même occasion.