On lui avait fait suivre le message suivant : convoqué dans le bureau de Chiron, 20h15. Liev avait reçu le message dans l’incompréhension la plus totale : qu’est-ce qu’il avait bien pu faire pour se faire convoquer par le centaure ? Il n’était là que pendant les vacances, et encore, quand il ne partait pas faire du bateau avec sa famille ! Et on le convoquait. C’était pas possible, il devait y avoir une erreur. C’était donc tout naturellement qu’il s’était rendu à la Grande Maison après avoir pris son repas comme tout le monde au réfectoire, et non sans avoir sacrifié une part de pizza à son père. Pitié, faites que ce soit une erreur, avait-il murmuré en fixant les flammes. Il ne voyait pas pourquoi il était convoqué, et il s’était donc rendu un peu plus tôt que prévu sur le lieu de RDV. Alors qu’il montait les marches pour se rendre au bureau, il entendit un bruit de voix et tomba nez à nez avec une fille d’Arès, assise à même le sol, tranquillement en train de fumer.

« Euh… Salut ? » Prononça-t-il d’un air intrigué, observant la scène se déroulant devant lui. Il était littéralement en face de quelqu’un fumant une clope, le tout devant le bureau du sous-directeur du Camp. C’était pas un peu… Oh et puis merde, de toute façon tout était devenu complètement fou à partir du moment où il avait appris l’identité de son père. Il s’adossa contre le mur, cherchant à mettre un nom sur le visage de la fille. Il lui fallut quelques secondes pour qu’il le retrouve enfin : Swann.

« Toi aussi t’es convoquée ? » Demanda-t-il. Puis, il réfléchit quelques instants : gosse d’Arès, fumant comme si de rien n’était au sein de la Grande Maison. Elle venait sûrement pas pour faire une partie de tarot avec le centaure. Sa présence était justifiée, au moins. Mais cela n’expliquait toujours pas pourquoi lui était convoqué. Il se gratta l’arrière de la tête, pas trop à l’aise. Il n’avait jamais été le sale gosse, n’avait jamais rien fait pouvant lui attirer des ennuis. Tout ça n’était qu’une erreur – alors pourquoi tout semblait lui indiquer le contraire ? C’est bon, relax. T’as juste à dire à Chiron qu’il s’est trompé et tout rentrera dans l’ordre. « On m’a prévenu ce matin, mais j’ai du mal à saisir pourquoi. J’veux dire, c’est déjà rare que je sois là… Et j’ai jamais rien fait de mal. Doit y avoir une erreur. »

Swann, l’air on ne peut plus sérieux, lui répondit.

« Nan je suis pas convoquée j'aime juste trainer devant le bureau de Chiron pendant l'heure du dîner et dégueulasser son parquet avec mes cendres. Par les dieux, comment t'as pu découvrir mon secret ? »

Liev fronça les sourcils, ne sachant pas trop quoi répondre face à une telle… réponse, jusqu’à ce qu’il voie le sourire malicieux plaqué sur le visage de la fille d’Arès. Ah, elle plaisantait ! Il était tellement à fleur de peau ces derniers temps qu’il n’avait même pas envisagé l’idée qu’on puisse lui faire une blague. Détends-toi, Liev. Il esquissa un sourire en coin et s’appuya contre l’un des murs du couloir, croisant les bras.

« On sait jamais. Vu tout le temps que vous passez à vous taper sur la tête entre rejetons d’Arès, vous devez avoir perdu un sacré nombre de neurones. Tu devrais consulter un médecin, juste au cas où. » Répliqua-t-il en imitant son air sérieux. Ouais, une blague sur le parent divin… Super original ! Surtout qu’avec son propre père, il y avait de la matière. C’était limite s’il ne donnait pas le bâton pour se faire frapper ensuite. Des fois, il se demandait s’il n’était pas un peu masochiste.

Il entendit alors des éclats de voix provenant du bureau où Chiron était censé les recevoir dans une demi-heure. Tendant l’oreille, il tenta de reconnaître les voix, mais à part celle du centaure, aucune ne lui semblait familière. Peut-être que le second directeur du camp faisait une réunion de famille, en compagnie de ses cousins, les Poneys Fêtards (il avait encore du mal à croire que Chiron avait des cousins se faisant surnommer ainsi). Dans tous les cas, cela ne le faisait que s’inquiéter davantage quant à cette convocation. Pourquoi lui ? Peut-être que Swann en savait un peu plus. Elle, elle devait sûrement savoir la raison de sa présence ici : elle était un peu rebelle, son sale caractère avait sûrement dû la trainer dans des histoires pas possibles et en plus, elle fumait au sein de la Grande Maison comme si c’était autorisé.

« Dis-moi, qu’est-ce que t’as fait pour être convoquée ici ? »