We will never get along

Il faisait chaud et j'étais en nage. Il était déjà 14h et depuis 9h ce matin, je ne faisais que m'entraîner dans l'arène. Mieux valait zigouiller les mannequins que les pensionnaires de la Colonie. Ils me tapaient sur le système tous et si je voulais une quête pour partir, je devais être prête physiquement. Je tapais donc sans relâche sur les mannequins, les autres demi-dieux craignant trop de m'affronter, de peur que je me prenne un peu trop au jeu. Quelle bande de mauviettes !

J'étais d'humeur passablement mauvaise aujourd'hui et l'air autour de moi était comme empli de ma nervosité, de mon énervement. Autant dire que si l'on s'approchait un peu trop près, je pouvais ne plus contrôler mon pouvoir et déclencher une jolie petite bagarre. Pas que l'envie m'en manquait d'ailleurs... Mais je me retenais. Si je me faisais exclure de la Colonie, je pouvais être sûre que mon géniteur en aurait après moi. Il me l'avait bien fait comprendre en me ramenant là il y a quelques semaines après ma petite escapade à New York.

Je suais donc à la tâche pour oublier. Oublier que Luke était mort. Oublier que les Dieux nous prenaient pour leur chaire à canon. Oublier que je ne rêvais que de partir loin d'ici. Oublier qui j'étais : la fille d'Arès, Dieu de la guerre. Et je tapais. Je tapais jusqu'à détruire ce foutu mannequin.

Je regardais autour de moi. La plupart des autres pensionnaires présents s'entraînaient par deux. Sauf une. Elle venait de débarquer. Une jeune fille aux longs cheveux. Je lui trouvais aussitôt l'air hautain. Je la regardais balayer des yeux l'arène, sûrement à la recherche d'un partenaire. D'humeur bagarreuse, je décidais de me faire les dents sur celle qui me paraissait être une petite nouvelle. Je m'approchais donc.

"Tu cherches à t'entraîner ?"

Je plongeais mon regard dans le sien avec toute mon assurance habituelle, persuadée que je l'impressionnerai malgré mes cheveux blonds et mes yeux bleus. J'avais beau avoir un visage d'ange, la plupart de ceux qui me connaissaient vraiment savaient que les apparences étaient trompeuses... Et la petite sang-mêlée en face de moi risquait bien de s'y tromper si elle ne prenait pas garde.

We will never get along

- Tu cherches à t'entraîner ?

Son regard était... particulier. Comme si elle haïssait Sophie plus que tout. En fait, c'était le genre de regard rageur qu'avaient généralement les Arès. Elle avait le droit de prendre cet air, de toute manière, car la fille d'Athéna avait pris un air hautain et arrogant. Elle avait remarqué cette fille avec laquelle personne ne voulait se battre. Pff ! comme si elle était meilleure que So' ! Comptant bien lui régler ce compte, à celle-là, elle lança :

- Ouais. Mais, avant, t'es la fille d'Arès ? Et tu es qui, au juste ?

Sophie concentra son essence divine dans la paume de sa main droite. Un poignard. Un poignard. Un poignard ! Il venait d'apparaître dans sa main. Elle maîtrisait plus ou moins ce pouvoir, depuis le temps. D'un air amusé, elle caressa la lame de son poignard. Comme si elle adorait tuer des gens. Un peu glauque...

La fille de la sagesse prit mieux le temps de regarder la blonde. Elle avait un air angélique, son visage lui donnait un air de fille innocente, sauf son regard, pensa Sophie. Son regard fichait tout en l'air. C'était comme elle. Sophie pouvait paraître gentille ou froide, il n'empêche que son regard d'un gris d'orage donnait l'impression d'analyser les gens et de penser milles choses à la fois. Pour le dernier point, c'était à peu près vrai. Elle pensait même trop, des fois. 

- J'ai l'impression que cet entraînement va être cool. J'ai pas arrêté avec les dagues, ce matin. Tu es ma première partenaire pour autre chose que ça. 

Sophie ricana. Elle aurait pu dire victime à la place de partenaire, elle n'aurait ressenti aucune différence dans les émotions. Si elle pensait juste et que cette fille était le rejeton d'Arès, il était naturel qu'elle se sente en concurrence vis à vis d'elle. La fille d'Athéna rejeta ses cheveux en arrière, élaborant déjà un plan. Elle pouvait essayer la première ligne de son manuel pour essayer de la désarmer. Ou elle pouvait faire une feinte, ou tenter la stratégie 1. La stratégie 2 était bien aussi. Peut-être que So' prenait cet entraînement trop au sérieux. Ce n'était qu'une sang-mêlée parmi tant d'autres. Pas besoin de lui accorder tant d'importance. Une nouvelle fois, elle sous-estima ses adversaires. Mais elle préférait ça que les sur-estimer, ça la dégoûterait d'elle-même. Pas super...

We will never get along

"Tu cherches à t'entraîner ?"
"Ouais. Mais, avant, t'es la fille d'Arès ? Et tu es qui, au juste ?"

Elle me regardait avec tant de dédain que je me surpris à vouloir lui tordre le cou. Si j'avais l'esprit belliqueux (aujourd'hui plus que d'habitude), je n'avais en revanche jamais voulu tuer un pensionnaire. Mais son ton, son air... Tout m'énervait chez elle et je n'étais pas à prendre avec des pincettes ce jour-là. Je répondis donc du tac au tac.

"Adriane. Et la politesse, c'est pas fait pour les chiens. Y a la manière de demander sans agresser les gens..."

Je la regardais, sachant pertinemment que je n'avais pas répondu à sa première question. Si elle voulait tant savoir qui était mon parent divin et redoutait (ou espérait ?) que ce soit Arès, peut-être était-elle enfant d'Héphaïstos ? Non... Ces yeux gris, ce devait être Athéna. D'où son air hautain je suppose. Elle fit apparaître un poignard. Ah elle voulait jouer à ça ? Je serrais mon épée dans ma main droite, vérifiant de ma main gauche que mon poignard attaché à ma ceinture n'était pas loin. Si elle me cherchait, elle allait me trouver... Elle ricana.

"J'ai l'impression que cet entraînement va être cool. J'ai pas arrêté avec les dagues, ce matin. Tu es ma première partenaire pour autre chose que ça."

Mais pour qui se prenait-elle cette gamine ? Elle devait bien avoir 5 ans de moins que moi et voilà qu'elle se croyait prête à m'abattre. Il allait en falloir plus pour me faire peur... ou m'impressionner. Elle paraissait cogiter un peu trop à mon goût. Mais tant qu'à faire, ça m'éviterait de devoir lui mettre une raclée trop vite. Si j'étais d'humeur à me défouler sur un mannequin, je savais que m'engager dans un duel serait dangereux. Pas seulement pour la petite prétentieuse mais aussi pour les autres autour qui risquaient de ressentir la colère ambiante et de se mettre, à leur tour, en colère.

Et ça, il valait mieux l'éviter. Si je ne pouvais plus sentir les Dieux, je ne voulais pas faire de mal aux autres pensionnaires, ils restaient ma première vraie famille. Je décidais donc de calmer un peu le jeu pendant que la jeune fille en face de moi réfléchissait (sûrement à la meilleure tactique à adopter. Ce qu'ils sont bêtes ces Athéna à toujours vouloir réfléchir...).

"Avant un duel, j'aime savoir à qui j'ai à faire... Qui es-tu donc ?"

We will never get along

- Oh, mais dis ce que tu veux, rétorqua-t-elle sèchement à la reproche d'Adriane.

Mais, par les dieux, qui était-elle pour lui parler ainsi ? Sophie était meilleure (enfin c'est ce qu'elle disait). Elle était surtout la meilleure pour créer des noeuds et les serrer encore plus, jusqu'à ce qu'elle jette la corde. C'était comme si elle tissait une long tapisserie parsemée de noeuds grotesques, au lieu d'en tisser une parfaite. So' était forte au tissage. Elle tenait ça de sa mère. Quand Adriane lui demanda qui elle était, elle répondit sur le même ton que la fille d'Arès, comme pour la narguer :

- Sophie. 

Un petit sourire narquois s'afficha sur le visage de Sophie. Il y avait des gens qui n'attiraient pas l'attention de So. Certains si, mais positivement. D'autres, comme Adriane, attiraient Sophie seulement pour l'hostilité qu'elle ressentait en voyant la personne. La plupart du temps, elle se limitait à parler. Mais des fois, elle profitait des entraînements pour se venger. Pas très sympa, hein ? même si elle voulait faire un duel contre cette fille visiblement plus âgée qu'elle (comme si ça changeait quelque chose...), elle préférait discuter d'abord. On ne sait jamais, ça pourrait l'aider.

- Et donc, je suppose puisque tu n'as pas voulu répondre à ma question, que tu es la fille d'Arès. Tu dois bien t'y connaître avec les armes. Tu aimes quoi comme armes ?

Elle disait cela comme si c'était une obligation de lui parler. Elle disait cela froidement, en la toisant. Ses yeux ne reflétaient plus une certaine analyse. L'orage était encore plus puissant dans son regard. On pouvait presque voir les éclairs sillonner dans ses yeux gris. Elle haussa un sourcil en disant soudain :

- Pourquoi personne ne veut s'entraîner avec toi ? Tu dois être vraiment très forte. Et puis la plupart des pensionnaires ont mon âge, mais, tu vois, moi j'ose venir te voir. 

Parce que tu n'es certainement pas assez forte pour que je continue mon chemin en passant à côté de toi, se surprit à penser Sophie. Même si elle était très prétentieuse, elle ne pensait pas souvent ce genre de choses... Non, en fait, elle le disait simplement à haute voix, normalement.

- C'est marrant (elle ne le pensait pas du tout), tu as l'air d'être un véritable ange innocent, alors qu'en fait tu es tout le contraire, n'est-ce pas ?

Certainement pas, en fait, pensait Sophie. Ça dépendait entièrement des gens. L'attitude dépendait des gens, tandis que la personnalité restait toujours la même. Elle classait donc Adriane dans la catégorie de "franchement je suis meilleure que toi tu m'agaces tu te prends pour qui !!".

We will never get along

"Avant un duel, j'aime savoir à qui j'ai à faire... Qui es-tu donc ?"
"Sophie."

Elle me sourit d'un air narquois. J'eus aussitôt envie de lui en coller une mais je me retins, resserrant ma poigne sur mon épée pour me calmer. Je ne bougeais pas, les lèvres pincées, espérant qu'avec un peu de chance, elle ne rajouterait pas à ma colère. Pas de chances, elle n'était pas très diplomate...

"Et donc, je suppose puisque tu n'as pas voulu répondre à ma question, que tu es la fille d'Arès. Tu dois bien t'y connaître avec les armes. Tu aimes quoi comme armes ?"

Je la toisais. Elle me tapait de plus en plus sur le système. Si j'avais tendance à être énervée envers tout le monde ces derniers temps depuis la guerre contre Cronos et les Titans, cette jeune demoiselle me mettait en rogne plus qu'à la normale. Néanmoins, voulant trouver le temps de me calmer avant tout, je décidais de lui répondre le plus poliment possible. Pourtant, c'est d'un ton froid que je dis :

"Oui, ça te pose un problème ? Et disons que tant que ça fait mal, j'aime ça."

Je la regardais d'un air mauvais, un petit rictus sur le visage. Je pensais que cela la calmerait mais pas le moins du monde. Soit elle était totalement inconsciente soit elle se prenait pour la plus puissante du monde... Il allait dans ce cas falloir lui rabattre le caquet et illico-presto. Trop d'assurance, c'est mauvais dans la vie et je comptais bien lui faire l'honneur de la calmer.

"Pourquoi personne ne veut s'entraîner avec toi ? Tu dois être vraiment très forte. Et puis la plupart des pensionnaires ont mon âge, mais, tu vois, moi j'ose venir te voir."

Je ricanais. C'était sûr : elle débarquait. Elle ne devait pas être arrivée depuis plus de quelques jours et elle pensait, de tout évidence, déjà pouvoir battre une Arès en duel, qui plus est une Arès qui avait 8 ans d'entraînement derrière elle... C'en était presque mignon tellement c'était naïf.

"Disons que depuis la guerre face aux Titans je n'ai plus... Très bonne réputation. Mais je ne refuse jamais les petits défis."

Petit, ça c'était certain. Ce n'était pas une fillette, toute pleine d'assurance soit-elle qui allait me faire peur. Et ce n'était pas la peine de me faire ce regard plein de haine, elle ne risquait pas de m'intimider. Si j'avais juste et que c'était la fille d'Athéna, ses petites tactiques ne marcheraient pas. L'une de mes premières formatrices, autre que Clarisse, était Annabeth et il n'y avait aucune chance que cette demi-portion soit meilleure qu'elle... Je la laissais donc me narguer à son aise, la laissant croire qu'elle pouvait être plus forte.

"C'est marrant, tu as l'air d'être un véritable ange innocent, alors qu'en fait tu es tout le contraire, n'est-ce pas ?"

Un rictus se forma sur mon visage. Je n'étais même plus en colère, pour la première fois depuis longtemps je m'amusais.

"Ah non, je suis une vraie gentille. Sauf quand on m'énerve. Dommage pour toi, tu es arrivée pile quand j'étais énervée. Je te laisse une dernière chance de déguerpir, saisis-là, conseil d'amie."

We will never get along

- Je suis une fille d'Athéna, comme tu l'as certainement remarqué. Ton conseil ne me servira à rien. Quand le noeud est trop serré, la tapisserie est fichue. Alors tu sais ce qu'on fait ? On fait avec.

Elle croisa les bras, bien décidée à ne pas lâcher l'affaire. Même si elle devait cruellement manquer de diplomatie - elle était énervée, aussi ! -, elle devait garder la tête haute et, malheureusement, devait anticiper une éventuelle défaite. Même si Adriane fanfaronnerait, elle devrait la féliciter. Mais elle avait intérêt à bien se battre, sinon... c'était fichu. Avant sa réplique, elle avait remarqué le visage d'Adriane s'adoucir. Comme si elle n'était plus en colère. C'était peut-être une faute qui risquait de la faire perdre. 

- Je crois qu'on peut très bientôt commencer ?

C'était très bizarre, la façon qu'avait Sophie de penser. Elle pouvait penser avec orgueil, puis commencer à désespérer, à changer subitement de vision sur Adriane. Mais une chose était clair : jamais elle ne pourrait la considérer pour une amie. Une partenaire, oui (et encore...), mais ça s'arrêtait là.

Pas le temps pour ça. Adriane avait l'air de se retenir de péter un plomb. Ce qui n'était, hélas, pas une bonne chose. Quand on est en colère, on se défoule et les coups peuvent être plus douloureux. Mais Sophie n'était pas stupide. Elle saurait comment faire avec une fille aussi colérique. Elle avait déjà son petit plan en tête.

- En tout cas, ce fut un plaisir de faire connaissance avec toi.

Elle accompagna ces paroles d'un sourire ironique. C'était le genre de vannes qu'on sortait à ses potes quand on s'entendait bien et qu'on venait de se rencontrer. Mais elle détestait déjà Adriane alors cette parole était censée la déconcentrer, ou bien la calmer. Ou simplement la braver. Peu importait, en fait.

Comme elle s'attendait à ce que l'entraînement (ou le combat) commence maintenant, elle se recula un peu d'Adriane, rengainant son poignard. Une nouvelle fois, elle concentra son essence divine dans sa paume droite et fit apparaître une épée dont le bronze céleste étincelait sous le soleil. Elle lança à Adriane :

- Bonne chance.

Elle avait beau être orgueilleuse, elle était loyal. Même contre ceux qu'elle n'aimait pas. La seule exception étant les monstres, bien-sûr. En plus, si elle sortait des fanfaronnades et qu'elle perdait, ce serait encore plus humiliant. Un peu d'orgueil suffisait et on voyait à l'expression d'Adriane que plus de son défaut fatal lui serait... bah, c'est un défaut fatal, donc... Elle serra brutalement la lame de son épée, avant de se souvenir d'un détail :

- Et nos pouvoirs, on peut les utiliser ? Je peux faire apparaître des armes, je pense que ce n'est pas juste pour ce duel alors, ça on oublie. Mais je peux toucher une lame sans me blesser.

Il ne fallait pas en dire trop. C'était comme l'orgueil. Un peu, mais pas trop. Comme l'espoir. Un peu, mais pas trop. 

We will never get along

"Je suis une fille d'Athéna, comme tu l'as certainement remarqué. Ton conseil ne me servira à rien. Quand le noeud est trop serré, la tapisserie est fichue. Alors tu sais ce qu'on fait ? On fait avec."

Elle croisa les bras et je ricanais. Il fallait lui reconnaître quelque chose : elle ne manquait pas de cran. Dommage pour elle, ça risquait de lui jouer des tours. Si je m'étais un peu calmée, je n'en restais pas moins rageuse et j'avais toujours envie de me défouler.

"Je crois qu'on peut très bientôt commencer ?"
"Je t'en prie, vas-y."

Je lui souris méchamment, mes yeux jetant des éclairs. Je n'étais pas la fille de Zeus mais j'avais pour autant des yeux tout à fait expressifs. Un peu comme ceux de mon père qui reflète tout à fait la rage et la colère. Je voyais la jeune fille douter en face de moi et souriais un peu plus.

"En tout cas, ce fut un plaisir de faire connaissance avec toi."

Je hochais la tête en signe de salut, la regardant toujours avec mon petit rictus. Elle continua :

"Bonne chance."
"A toi aussi demi-portion."

Je me mis en garde, sans bouclier. Autant la jouer vraiment loyale et lui laisser une chance. Elle fit apparaître une épée puis me demanda :

"Et nos pouvoirs, on peut les utiliser ? Je peux faire apparaître des armes, je pense que ce n'est pas juste pour ce duel alors, ça on oublie. Mais je peux toucher une lame sans me blesser."

Je la toisais en réfléchissant. Personne n'était invincible et je voulais juste la battre, pas la tuer. Son pouvoir ne devrait donc pas poser plus de problème que cela et si elle avait droit au sien, je pouvais utiliser le mien et l'aveugler par la colère. Je soupirais, comme résignée et répondis :

"D'accord, si tu veux. Tu utilises le tien, j'utilise le mien si j'en ai besoin en revanche."

Je souris et me mis de nouveau en garde, attendant qu'elle lance la première estocade. Après tout, elle était la plus jeune et j'étais tout à fait polie. Je préférais lui laisser une dernière chance de me tourner le dos et partir sans aucune blessure. Je sentais pourtant qu'elle resterait plantée là pour le duel. Orgueil, courage, naïveté ? En tout cas, je me doutais qu'elle ne reculerait pas. Tant pis pour elle.

We will never get along

- A toi aussi demi-portion.

Sophie ne broncha pas. Elle fixa quelques instants la lame de son épée, puis concentra son essence divine dans ses deux paumes de main. Elle n'allait pas avoir mal aux mains. Allez. C'était la première attaque, elle devait en sortir vainqueur. Elle répéta son plan dans sa tête. Stratégie une, puis F1, D1, puis A5 et elle finirait par une dernière feinte. 

Elle courut vers Adriane et, pour la déboussoler, se mit à partir à droite, puis à gauche, continuant sa course vers elle. Elle se trouvait à droite à présent, et arrivait vers Adriane. Elle fit mine d'envoyer un coup d'épée n'importe où, puis elle feinta à gauche et envoya réellement le plat de sa lame dans les genoux d'Adriane. Trois secondes plus tard, elle envoya un coup d'épée au bout de celle de la fille d'Arès pour essayer de lui faire lâcher prise. Finalement, elle envoya son pommeau dans la joue de son adversaire. Elle avait presque fini. Elle était à gauche d'Adriane, elle passa devant elle, s'arrêtant moins d'une seconde pour repartir derrière elle. Là, elle envoya son genou gauche dans le dos de la fille.

Elle partit vers la gauche pour retourner à sa place initiale, laissant la possibilité à Adriane d'attaquer.

We will never get along

Je me mis en garde, attendant qu'elle assène le premier coup ce qui ne tarda pas. Partant à droite, elle feinta à gauche. J'arrêtais son épée de justesse avant qu'elle m'entaille un genou. J'étais fatiguée après avoir passé mon après-midi à m'entraîner et mes réflex étaient moins bons. Heureusement pour moi, ils étaient excellent d'habitude mais soudain, je devenais à la portée de mon adversaire. Bloquant mon épée, elle me mit un coup dans la joue. Mine de rien, elle avait de la force la petite. Je crachais un peu de sang alors qu'elle passait dans mon dos pour m'assener un violent coup. Je roulais par terre, me relevant avec panache. Crachant encore un peu de sang, j'imaginais les flammes qui devait naître dans mes yeux. En cet instant, sûre que plus personne ne doutait de qui était mon père.

Je m'élançais avec hargne et assenais de violents coups, rapprochés à Sophie. Elle était plutôt frêle et ne pourrait pas tenir à cette allure très longtemps. Je continuais donc ma manoeuvre, enchaînant les coups d'épées à droite, les estocades à gauche, les feintes au centre. Je voyais autour de nous quelques pensionnaires s'arrêter en plein entraînement, formant un cercle autour de nous. Nul doute que vu mes cris de rage, je devais attirer l'attention. Je plaçais un coup sur sa droite, pas toujours bien protégée puis enchaînait avec un violent coup de pied dans le ventre. Il fallait pas venir me chercher en me frappant dans le dos... Quelle lâcheté.

We will never get along

Comment dire... Adriane était forte, mais pas à la façon de Sophie. En fait, elle se battait comme n'importe quel Arès. Les coups ne sont pas souvent réfléchis, ce qui compte, c'est de donner des coups, tout simplement.

Elle s'y attendait, mais jamais elle n'avait vu quelqu'un d'aussi rapide, à part Jade, bien-sûr.

Sauf que son pouvoir lui permettait de bloquer ses coups sans se faire mal, mais il fallait faire vite car ça lui pompait de l'énergie. Au début, elle esquiva ses coups, bien qu'elle devait avancer et reculer en fonction des estocades, et quand son épée frôla son bras en lui arrachant un filet de sang qui la fit grimacer, elle l'empoigna fermement avec sa main gauche. Hélas, elle ne tiendrait pas longtemps. Elle asséna un coup d'épée sous l'avant-bras, pour essayer de la faire se stopper dans ses coups. Avec un cri de guerre, elle ramena l'épée d'Adriane vers elle, avant de se mettre à faire des ronds autour de la fille d'Arès, obligeant les pensionnaires à se reculer. Ce n'était pas un spectacle, c'était un entraînement, bon sang !

Elle continua à sprinter en marquant un cercle autour d'Adriane. Soudain, elle s'avança et piqua légèrement la nuque de la fille d'Arès avec son épée. Aussitôt ce geste accompli, elle se remit à courir autour d'Adriane. Elle avait réussi à stopper son pouvoir qui l'empêcherait d'avancer dans le combat.

Une nouvelle fois, elle tenta une attaque. Envoyant le plat de sa lame (une nouvelle fois...) contre les côtes de la jeune fille, elle attrapa le flanc gauche d'Adriane et la propulsa vers la droite de cette pression. Au passage, elle glissa son pied gauche entre les deux pieds de la fille du dieu de la guerre, pour la faire tomber. 

We will never get along

Je la touchais au bras et elle empoigna mon épée. Je râlais, de plus en plus en colère. Certes, j'avais dit oui à l'utilisation de son pouvoir mais ça avait un inconvénient : elle ne voulait pas vraiment lâcher ma lame. Elle m'envoya un coup sous l'avant-bras. Touché. Je grimaçais de douleur alors qu'elle envoyait valser mon épée vers moi avec un cri de guerre. Si je ne me trompais pas, elle aussi commençait à s'énerver.

Elle se mit à courir autour de moi, de plus en plus vite, je tournais au centre, la suivant du regard. Mais elle était rapide, plus que moi plantée au milieu. "Tu as fait le mauvais choix" me susurra une petite voix quand elle me piqua à la nuque. Heureusement, j'en avais connu d'autres. Je la regardais faire et me concentrais sur ma colère folle contre cette petite peste. Il fallait l'amener à arrêter de réfléchir. Concentrée, je ne la vis pas venir quand elle m'appliqua le plat de sa lame à droite pour venir me faire valdinguer à gauche. Un point pour Clarisse : mieux valait être mastoc et lourde qu'athlétique et légère comme moi. Je grommelais et vis rouge.

Je concentrais toute ma rage sur Sophie pour l'aveugler à son tour par la colère. Si elle n'était concentrée que là-dessus, elle aussi, elle ferait des erreurs. Trop pour me battre. On a beau être une enfant d'Athéna, on ne peut pas toujours s'en sortir au combat malgré toutes les bonnes tactiques. Je ricanais méchamment et fis en sorte de tellement la faire bouillir que quand je me redressais, j'étais certaine que la partie était gagnée. Elle allait agir comme moi, attaquer de front pour m'annihiler. Tant mieux. Je la bloquerais plus facilement et l'enverrai elle aussi voler à plat ventre. Ensuite, pas la peine de l'humilier plus. Perdre son sang froid, pour une fille d'Athéna, c'était déjà moche en soi.

Un rictus barra mon visage alors que je voyais la colère monter en elle et que j'étais prête à mettre mon plan à exécution.

We will never get along

 
Sophie continuait de courir et d'un coup, elle se sentit vaguement en colère. Un instant après, elle voyait rouge. Qu'est-ce qu'il se passait ? Ce qu'il se passait, c'est que Adriane l'avait tellement énervée pour on ne sait quelle raison qu'elle voulait l'anéantir sur-le-champ. Elle agissait comme une Arès. Sa stratégie devint : frapper, ainsi que frapper et frapper encore un peu.

Une petite voix lui disait de se calmer. Elle lui disait qu'Adriane l'embobinait mais elle n'en avait rien à faire. Elle était tellement aveuglée par la colère qu'elle ne réfléchissait plus à ses coups. Elle était déjà devenue vulnérable. Heureusement pour elle, elle avait des réflexes issus de stratégies qu'elle faisait souvent. C'était donc un combat à 85% façon Arès et à %15 façon Athéna.

Elle devait faire quelque chose. Frap... Non, pas frapper, réfléchir. Une petite voix lui hurlait : concentre-toi ! Fais de bonnes stratégies ! FONCE PAS DANS LE TAS PAR LES DIEUX !
Et une autre voix, celle de la colère, rétorquait encore plus fort : Attaque !! Tu veux gagner ou quoi ? Faut envoyer des coups n'importe comment !! ALLEZ!!


Être en colère, pour elle, c'était le grand désastre. Elle se battait avec sa propre intelligence, sa propre conscience. Mais Adriane était visiblement très forte pour aveugler de colère les gens. Elle ne résistait pas. Seuls ses réflexes lui donnaient une infime chance de... de gagner ? Non, juste de perdre un peu moins la face.

Elle recula pour être loin d'Adriane. Et d'un coup, elle fonça sur elle en faisant tournoyer son épée pour se défouler quelque peu. Elle envoya un coup brutal au niveau du ventre de la fille. Son épée partit un peu vers la droite tant la colère l'empêchait de viser correctement. Elle était sûre qu'Adriane parerait son coup, alors que fit-elle ? Bah elle ré-attaqua. Elle envoya un coup de coude dans la joue droite d'Adriane. Une nouvelle fois, elle eut du mal à attaquer, tant la colère la déconcentrait. Allez, frapper, frapper, frapper !

Non, reculer, reculer et faire une stratégie !! 

Rien n'y faisait. Pourtant, elle se força à reculer.  Elle inspira un grand coup, proférant toutes les pires insultes du monde dans sa tête. Elle n'arrivait pas à se calmer. C'était fichu, pour elle. 

We will never get along

 

Je la vis perdre peu à peu le contrôle tout en ricanant. Elle attaquait si fort et si maladroitement soudain que je pouvais parer ses estocades avec un peu de jugeote. Je me réjouissais, j'allais gagner. Elle tenta de me frapper avec toute sa force vers le ventre et je la repoussais. Elle me donna à nouveau un coup dans la joue. Comme la dernière fois. Je n'eus donc que peu de mal à légèrement bouger pour limiter la douleur. Elle recula, tentant de reprendre ses esprits alors que je me concentrais pour qu'elle ne puisse pas décolérer.

Les autres autour de nous, voyant ça, reculèrent et retournèrent à leurs activités. De toute évidence, ils avaient espéré que cette demi-portion me battrait. Dommage, elle n'avait pas eu beaucoup de réflexion en proposant d'utiliser nos pouvoirs. Pas en ignorant les miens. Je souris méchamment et assenais un coup vers sa jambe tout en sachant qu'elle devrait réussir à le contrer. Mais là n'était pas mon but. Tout en faisant cela, je me baissais et lui envoyais un croche-pattes pour qu'elle mange le sol, sachant qu'elle devrait lâcher son épée pour ne pas la manger elle aussi.

Je me relevais ensuite, la toisant. Je me calmais peu à peu, le souffle court. Mine de rien, la petite n'avait pas démérité et je lui reconnaissais au moins ça. Je lui tendis la main pour se relever, fairplay, avant de lui dire avec un ton froid :

"La prochaine fois, réfléchis avant de te confronter à plus fort que toi... Et entraîne-toi demi-portion, tu pourrais devenir une bonne combattante."

Je lui souris de nouveau, un petit rictus sur les lèvres. Puis, je m'éloignais d'une démarche assurée. Direction les Apollon pour soigner cette vilaine blessure au bras.

We will never get along

 
Elle se sentit un peu moins énervée après qu'Adriane ait tenté de lui donner un coup dans la jambe, qu'elle avait paré en "réactivant" son pouvoir et en chopant l'épée d'Adriane pour quelques secondes. Pour finir, elle avait réussi à reprendre un peu ses esprits, il n'empêche que le mal était fait. Le temps qu'elle pare le coup de la fille d'Arès, celle-ci lui avait déjà fait un croche patte qui l'obligea à lâcher son épée. Mais, malgré la colère, elle était orgueilleuse et refusait de se faire aussi simplement humilier. Alors elle agrippa la cheville d'Adriane et la tira vers elle pour la faire basculer en arrière. Son visage heurta le sol de l'arène sans trop de dégâts puisqu'elle avait essayé de se retenir avec ses mains. 

Adriane se releva et tendit sa main à Sophie. Bon, elle avait du bol. La fille ne fanfaronnait visiblement pas. Elle prit donc la main de la fille d'Arès et s'aida de cet appui pour se relever.

- La prochaine fois, réfléchis avant de te confronter à plus fort que toi...

Sophie rétorqua aussitôt :

- J'ai bien réfléchi et malgré ma défaite je pense que j'ai eu raison de te défier. Ça m'a très bien entraînée. Et le coup de m'aveugler par la colère, je retiens. Et ce n'est pas la dernière fois que tu me croiseras.

Elle la gratifia d'un sourire froid. Une nouvelle fois, elle utilisait des expressions qu'on utilisait généralement pour parler avec des amis. Mais Adriane n'était pas son amie, juste une partenaire contre qui elle aurait très bientôt sa revanche. 

- Et entraîne-toi demi-portion, tu pourrais devenir une bonne combattante.

Elle hocha la tête. Elle lui envoya un dernier regard hostile avant que la fille d'Arès ne parte guérir ses blessures chez les Apollon. Elle en avait une au bras, mais elle ne ressentait pas le besoin de se soigner.

Elle partit en direction de son bungalow en laissant l'épée au sol.