L’entrepôt puait. Littéralement. À toutes les portes se trouvaient au moins deux gars, armés jusqu’aux dents, tandis que d’autres circulaient nerveusement entre toutes les tables qui avaient été installées. C’était un moment important pour tous le réseau de dealers du coin car ils recevaient une importante cargaison de cocaïne, venant tout droit d’Amérique du Sud. Ce genre d’actions avait lieu à peine trois ou quatre fois par an, ce qui rendait l’évènement important et extrêmement dangereux. Personne ne voulait se faire chopper par les flics. La nuit, cet entrepôt se transformait en véritable forteresse, gardée par des tas de gars tirant sur tout ce qui bouge. Hero savait pas trop comment il s’était débrouillé mais il avait fini par réussir à avoir sa place dans l’entrepôt, parmi les quelques têtes connues de gangs et barons de la drogue. Une charmante réunion.

Ce qu’ils ne savaient pas, c’était qu’Hero n’était pas vraiment de leur côté. Il n’avait qu’à faire un signe et une tonne de policiers surgissaient et arrêtaient tout le monde. Et ouais. Pour une taupe, Hero trempait jusqu’au cou dans ces sales histoires. Mais bon, tout était de leur faute aussi… Il y avait eu un problème, deux semaines avant cela. Un type avait flippé et s’était tiré avec presque tout un camion rempli de drogue. Leur priorité. Le mec avait été descendu, évidemment, mais les bons à rien qui devaient s’en charger n’avaient pas caché le corps. Résultat, il avait été retrouvé et deux jours plus tard, Cyril avait contacté Hero pour des renseignements. Il en avait plein. Ce mec retrouvé mort n’était que la façade visible de l’iceberg – en-dessous, pleins d’autres cadavres flottaient, mais ces types n’inquiétaient jamais personne. Enfin. C’était de leur faute quoi, ils n’avaient qu’à faire mieux leur boulot.

Dans tout l’entrepôt, quasiment tout le monde avait retiré son teeshirt pour que la drogue n’imprègne pas leurs vêtements. La chaleur, moite, rendait l’action encore plus pénible, mais le demi-dieu avait connu pire. Un coup d’œil sur son téléphone lui indiqua minuit moins quinze. Il ferait mieux de se sortir pour indiquer le feu vert aux gars qui n’attendaient que ça, mais des éclats de voix se firent entendre. Un des barons surgit de derrière une porte, l’air furibond, suivi de quatre de ses sbires.

« C’est qui le prochain que je bute ? »

Hurla-t-il, sortant son flingue d’une poche de son gilet. Un mouvement de panique agita le groupe de personnes « travaillant » et Hero se plaça d’instinct derrière une table recouverte de poudre.

« Qu'est-ce que tu racontes Tiny? »

Clama un mec, presque aussi baraqué que le premier.

« Ce que je raconte, c’est que je viens de buter Dallas parce qu’il a essayé de s’enfuir avec presque quarante kilos de coke ! Tu sais combien ça fait ? Ça fait deux putain de millions de dollars ! Alors, je répète ma question une dernière fois : qui est le prochain enfoiré qui va essayer de me voler, histoire que je le tue avant ? »

Hero fronça les sourcils tandis qu’un brouahaha d’exclamations répondait au baron. Dallas était un minable dealer qui arnaquait la moitié de ses clients en leur vendant du produit à qualité ultra basse. Il n’avait que ce qu’il méritait. Mais sa débilité tombait vraiment à un sale moment, car dans une ambiance aussi tendue (que son don n’arrangeait en rien) il lui serait vraiment difficile de sortir sans éveiller de soupçons. Avoir à maîtriser Tiny ne le dérangeait pas vraiment, mais avoir son armée de chiens à ses trousses si. Il n’était même pas sûr que les policiers aient assez de balles pour tous les abattre tellement ils étaient nombreux. De vrais parasites. Tant pis, il fallait tenter le tout pour le tout. Il se leva brusquement et se dirigea vers l’une des portes menant vers l’arrière du bâtiment, là où Cyril et ses hommes pourraient le voir facilement.

« Hero, où est-ce que tu vas ? Tu comptes t’enfuir avant que je ne plante un couteau dans ton dos ? »

Putain. Hero se retourna et toisa Tiny d’un air dégoûté. Ce mec le répugnait : il puait la sueur, il gueulait sur tout le monde et il avait des pions partout. S’il avait quelqu’un dans le collimateur, ce quelqu’un ne survivait pas 24h. Hero se promit de le livrer aux policiers dès qu’il en aurait l’occasion.

« J’ai pas l’intention de voler quoique ce soit. J’prends même pas de coke. »

Lui répondit-il sèchement.  Il espérait sincèrement que Tiny se sente juste mal et lui foute la paix plutôt que d’avoir envie de lui chercher des poux. Mais visiblement, cet abruti avait envie d’emmerder le monde.

« Me prends pas pour un débile, frère. »

(Pourtant, il en était un. Genre, le roi des rois.)

« Je sais que toi et Dallas étiez potes mais c’est pas le moment pour retourner ta veste. T’es avec moi ou pas ? »

Oh pitié. Ce mec était d’une stupidité… Lui et Dallas, potes ? Hero leva les yeux au ciel et hocha la tête.

« Ouais, j’suis avec toi. Dallas est mieux mort que vivant, d’façon. Maintenant, est-ce que je peux prendre l’air, ou bien ressens-tu le besoin fulgurant de m’accompagner au cas où un vilain policier se cache derrière les poubelles que tes gars ont retourné au moins dix fois ? »

Dit-il d’un air exaspéré.
L’heure tournait. Si Cyril n’avait pas de nouvelles avant minuit, il risquait de s’inquiéter et de faire tout capoter. Mais ce plan, c’était la casse du siècle. Il n’y aura pas d’autres occasions, ce qui signifiait qu’il ne pouvait pas se coltiner Tiny dans ses pattes.

« Proposé aussi gentiment… On aura qu’à parler affaires, toi et moi. J’ai quelques trucs à te proposer. »

Sérieusement ? Ce mec n’existait-il donc que pour lui mettre des bâtons dans les roues ? À contre-cœur, Hero le suivit hors de l’entrepôt, l’air maussade. Un regard sur son téléphone lui indiqua minuit moins deux. S’il ne faisait pas le signal comme convenu, tout risquait de se foutre en l’air. Il devait faire vite, même avec Tiny dans les pattes. Tant pis s’il faisait griller sa couverture, Cyril n’aurait qu’à le tuer juste après. Une fois dehors, Tiny se mit à lui parler des différents trafics qu’il organisait entre la Colombie et les Etats-Unis. Un coup d’œil lui suffit pour remarquer que personne à part eux ne pouvait les voir. Un point de marqué. Alors il donna brusquement un coup de pied dans les poubelles, les faisant se renverser dans un fracas infernal. Tiny s’exclama :

« Qu’est-ce que tu fous ?! »

Et Hero lui répondit en lui donnant un coup de poing qui l’envoya s’écraser au sol, entre les déchets – ce qu’il était vraisemblablement. C’était le signal. Hero leva sa tête et adressa un signe de main à Cyril, qui devait l’observer quelque part là-haut.

Des bruits de pas se firent brusquement entendre et Hero vit surgir des dizaines de gars armés se dirigeant vers l’intérieur de l’entrepôt. Il allait y en avoir des arrestations, ça oui. De ce qu’il savait, tout ceux qu’il connaissait à l’intérieur avait un casier suffisamment rempli pour finir en prison. Un festin pour les policiers. Mais parmi tous ces pourris, le seul dont le sort l’intéressait vraiment était Tiny. Lui, il avait intérêt à croupir derrière les barreaux jusqu’à ce qu’il en crève. Il ne méritait pas mieux, de toute façon.

« Ça va, pas trop secoué ? »

Lui demanda Cyril.
Hero secoua la tête en souriant.

« Nan, ça va. Je m’attendais juste pas à ça mais au final, cet idiot m’a facilité la tâche. »

Il se retourna pour regarder l’entrepôt, dont ne tarderaient pas à sortir les policiers accompagnés des dealers. Mais s’il le voyait comme ça, indemne en train de discuter avec un policier, ils comprendraient que Hero n’était pas de leur côté. Et si Cyril voulait continuer à avoir ses informations, il valait mieux pour lui que le fils d’Eris ne se fasse pas griller sa semi-couverture.

« Donne-moi un coup de poing. Il faut pas qu’il voit que je suis de votre côté alors fais comme si tu m’arrêtais, le temps qu’on les emmène jusque dans les voitures. S’ils comprennent, ils feront passer le mot même en prison et ce sera mort pour nous deux. »

Il passa une main sur son visage, se préparant à la douleur qui allait bientôt y survenir. Mais c’était un mal pour un bien : c’était soit ils jouaient le jeu, soit les autres mecs le grillaient et se chargeaient de faire comprendre aux autres qu’il était la taupe. Et si ça se passait comme ça, Hero le savait très bien, il serait un homme mort avec toute la ville à ses trousses. Il l’avait déjà vécu une fois et il avait fui parce que rien ne le rattachait. Mais là, c’était différent. Il appréciait à sa vie à New York et il appréciait son job d’informateur de la police même si ça lui faisait courir des risques énormes.

Cyril hocha la tête et l’empoigna presque aussitôt pour le plaquer contre la voiture, les mains dans le dos. Hero reconnut le cliquetis des menottes.

« Tu vas voir ce que c'est que de jouer au con avec moi. Allez, en voiture ! »

Et il s’effondra sur le siège arrière de la voiture de police de Cyril. Alors qu’ils quittaient la scène, les sirènes allumées, Cyril lui tendit une clé dès qu’il trouva le temps de s’arrêter à un feu rouge.

« Normalement, je n'ai pas serré tes menottes, mais autant que tu gardes les mains libres pendant le trajet... Tu les remettras en arrivant. Tu veux bien me faire un petit rapport, s'il te plaît ? Histoire que ton interrogatoire ne dure pas des jours et des jours comme les autres. »

Hero hocha la tête, stoïque, et attrapa la clé pour commencer à triturer ses menottes. Il n’aimait pas avoir les mains attachées, c’était comme s’il ne pouvait plus rien faire… Heureusement, il était plutôt habile, et il parvint à se détacher rapidement.

«Ça a dégénéré dans l’entrepôt. Ces cons sont incapables de s’en tenir à un plan précis, je sais pas comment on peut les considérer comme des pros… Ils ont fallu tout faire foirer sans que j’ai besoin d’agir. Tiny a buté Dallas, un dealer pourri, sauf que Dallas fait partie d’un gang qui monte en puissance dans le Bronx. Et s’ils apprennent qu’il a été tué par Tiny, il va y avoir un sacré règlement de compte. »

La cargaison de drogue venant de Colombie n’arriverait sûrement pas dans les poches des dealers, ce qui allait aussi créer de sacrées tensions entre les différents réseaux. Les prix allaient monter, sûrement. Mais ça, c’était plutôt une bonne nouvelle puisqu’il tirait lui-même pas mal de fric de ce trafic-là.

«Je sais pas où est le cadavre de Dallas, mais tes gars vont sûrement le retrouver là-bas. Tu ferais mieux de mettre Tiny sous les barreaux pour ce meurtre, il est plus utile vivant que tué par le gang de Dallas. Peut-être même qu’il pourra vous donner des informations que je détiens pas, vu qu’il est en relation avec des barons que je ne connais pas. »

Il posa sa tête contre la vitre, le métal froid des menottes entre ses mains. Il ne savait pas vraiment s’il appréciait de vivre comme ça et de mener un double-jeu. Au moins avait-il l’impression de faire quelque chose de juste : tous ces pourris ne méritaient que la prison (dans le meilleur des cas). Et s’il pouvait aider à les faire emprisonner, il le faisait avec joie. Être tombé sur un flic comme Cyril était vraiment un coup de chance, il doutait qu’il y en ait deux comme lui à New York – prêt à croire sur parole un dealer et lui donner une chance de faire ce qui est bien.

Après ses déclarations, Cyril semblait réfléchir à la meilleure solution qu’il pouvait trouver pour éviter un massacre à travers toute la ville.

« Dès qu'on arrivera, il sera mis au frais et au secret. Et je mettrai des hommes de confiance presque tout le long du trajet au cas où... »

Puis, arrivé devant le commissariat, il lui fit signe de remettre ses menottes, ce qu’Hero fit presque comme un automatisme. Ce commissariat, il le connaissait bien, trop bien même. Il ne comptait plus les fois où il était venu et où il avait été interrogé. Au départ, il ne pouvait pas blairer Cyril – parce que c’était un flic, certes, mais qu’en plus il ne semblait pas vraiment avoir peur de lui. Or, avec son don, Hero mettait généralement tout le monde mal à l’aise, même ceux qui l’interrogeaient. Alors à l’époque, il ne pouvait vraiment pas le saquer. Heureusement, les temps avaient changé et maintenant, ils savaient qu’ils pouvaient compter l’un sur l’autre.
La salle d’interrogatoire lui semblait presque trop confortable après l’enfer de l’entrepôt et Hero s’assit en poussant un soupir de soulagement. Puis, voyant Cyril reprendre ses airs de dur à cuire, il comprit qu’il fallait encore jouer la comédie quelques instants.

« Bon, tu as le choix jeune homme. Soit tu témoignes contre le gang, soit on t'enferme pour complicité dans le trafic de drogue et autres crimes du même genre. »

Même Hero y aurait crû s’il ne savait pas qu’il avait son propre rôle à jouer dans l’histoire. Il savait que ceux qui les observaient le connaissaient. Il se balança sur sa chaise et répondit d’un air narquois.

« T’as rien contre moi, mec. Tu peux pas me mettre en taule. »

Puis, des bruits de pas s’éloignant se firent entendre et il se réinstalla sur sa chaise, bricolant ses menottes pour avoir les poignets libres.

« Café, chocolat ? Autant bien s'installer, tu ne penses pas ? »

Hero hocha la tête avec un petit sourire. Le café étant son pêché mignon, il répondit presque automatiquement.

« Un café pour moi, ça suffira. Ton commissariat m’avait presque manqué. »

Cyril sourit.

« Pour certains, tu as manqué aussi. Bouge pas. »

Hero esquissa l’ombre d’un sourire. Il ne doutait pas un seul instant que Cyril faisait partie de ces "certains".
Quand Cyril partit chercher les cafés, Hero en profita pour glisser l’une de ses mains dans la poche de son pantalon et en sortir un vieux portable cabossé. Normalement, il était déconseillé aux demi-dieux de conserver des appareils électroniques car cela attirait les monstres mais il considérait qu’il ne pouvait pas abandonner son petit business. Il ne roulait déjà pas trop sur l’or alors s’il mettait fin à la seule source de revenus qui lui restait, c’est-à-dire la drogue, il en crèverait. L’écran rayé de l’appareil affichait des dizaines d’appels manqués venant de numéros que Hero ne connaissait que trop bien. Alors qu’il les effaçait tous, son téléphone vibra et un sms apparût sur l’écran.
Le numéro était masqué. Hero fronça les sourcils et releva les yeux au moment-même où Cyril rentrait dans la pièce, les cafés à la main.

« Bon, Tiny a des doutes sur toi, il paraît qu'il répète à tout bout de champ qu'il veut ta peau... Je serais toi, je me ferais discret pendant quelques temps, sait-on jamais. Si besoin, tu sais où frapper... »

Les paroles du policier ne faisaient que confirmer ce qu’il venait de recevoir.

« Ses gars sont au courant. Je viens de recevoir des menaces. »

Il fit glisser le téléphone sur la table pour lui montrer le sms et attrapa le gobelet qu’il vida d’un coup.

« Ça veut dire que je vais devoir quitter mon squat et sûrement tout le quartier. Je peux pas rester dans ton commissariat indéfiniment, ce serait trop beau. »

Il fronça les sourcils. L’image de la Colonie apparût dans ses pensées. C’était bien le seul endroit où personne ne pouvait le trouver… Mais il ne pouvait pas en parler à Cyril.

« Je vais me débrouiller. Je vais me procurer un flingue et tout ira bien pour moi. »

Cyril lut le SMS avec attention. À son air grave, Hero devina que son cerveau de policier devait carburer à 100 à l’heure pour trouver une solution à ce merdier.

« Avant que je ne te raccompagne à l'entrée du commissariat, j'aimerais te faire une proposition, quand même. On a un grenier qui ne sert à rien depuis longtemps, tellement longtemps que je suppose que je suis le seul à connaître son existence dans ce commissariat. Je pense que si on le rend un peu habitable, ça devrait aller en attendant que ça se calme... »

Il fronça les sourcils. La proposition de Cyril était attirante, c’est vrai… Mais était-ce plausible ? N’aurait-il pas des problèmes en cachant un délinquant dans le commissariat ?

« Après, c'est comme tu le sens. Mais je ne les laisserai pas nuire à quiconque, tu peux me croire. Je te laisse décider, je reviens dans une dizaine de minutes le temps de faire mon rapport. »

Et il avait bien besoin de temps pour pouvoir réfléchir à cette proposition. Cyril se leva, glissa quelques mots à un policier qui se posta immédiatement devant la porte de la salle d’interrogatoire. Hero leva ses mains menottées avec un sourire innocent, l’air de dire « t’as pas besoin de te méfier ». Il n’était pas fou au point de vouloir tenter de s’enfuir du commissariat. Il était plus en sécurité à l’intérieur qu’à l’extérieur. Mais est-ce que cela signifiait qu’il devait accepter ce que lui proposait Cyril ? En restant dans ce grenier, ne faisait-il pas courir des risques au policier ? Hero n’avait jamais aimé dépendre de quelqu’un. Mais savoir que dehors, dans la rue, des types l’attendaient sûrement de pieds fermes pour le tabasser ne le rassurait pas. Il avait toujours été effrayé par la mort et ne tenait pas à l’affronter. Même en se procurant un flingue, il n’avait quasiment aucune chance de passer la nuit s’il sortait du bâtiment. Il ne voulait pas prendre de risques. Sa décision était prise.
Une dizaine de minutes plus tard, quand Cyril revint, Hero avait les mains croisés et l’air beaucoup moins anxieux que lorsqu’il avait reçu le sms. Il avait éteint son portable et écrasé sa carte SIM sous son talon, de sorte à ce que l’on ne puisse pas le localiser ici.

« Je suis d’accord. Je reste ici, dans le… Grenier. Mais seulement pour quelques jours. Il faut que ces gars m’oublient mais je peux pas me cacher indéfiniment. Et je peux pas abuser trop longtemps de ton aide. »

La réponse sembla satisfaire Cyril qui lui adressa un sourire.

« Je suis heureux que tu aies accepté ma proposition. Viens avec moi, on va arranger ce grenier. »

Hero essaya d’imaginer Cyril en conseiller déco d’une émission, en vain. De toute façon, il se fichait pas mal du confort de l’endroit, étant habitué à dormir dans des hangars ou parfois à même le sol dans des conditions épouvantables.
Il suivit donc le policier dans le commissariat, essayant de mémoriser le chemin qu’ils prenaient mais, au bout de quelques couloirs, il finit par complètement perdre ses repères et arrêta d’y penser. Ils arrivèrent donc jusqu’au grenier, qui semblait en fait beaucoup plus accueillant que les dix derniers squats que le fils d’Eris avait fréquentés.

« Et il n'y a pas de poussière, ou très peu... Ou alors, je suis miro. Bref, tu peux rester ici le temps que tu veux, tant que tu me préviens si tu dois partir. Des questions ? »

Il se fichait de la poussière. L’endroit lui convenait à merveille.

« C’est tout bon pour moi. Même si potentiellement, je suis dans la base de l’ennemi… Je suis plutôt content d’être là. »

Il esquissa un sourire. Pendant un instant, il se remémora le sms qu’il avait reçu et sentit un frisson lui parcourir l’échine. Non, il ne devait pas s’en inquiéter. Ces pauvres types ne penseront jamais à venir jusqu’ici – et même s’ils y songeaient, ils ne le feraient pas. C’était des chiens apeurés à qui on avait retiré leur chef. Avec, ils pouvaient se permettre d’aboyer et de mordre mais sans, ils n’étaient plus rien. Cette situation lui plaisait.

« M-Merci, en tout cas… Je ne sais ce que j’aurais fait, sans toi. Enfin si, je sais. Je serais probablement mort, descendu avec une dizaine de balles dans le corps. Tu me sauves la vie, en quelque sorte. »