Avalanche de livres

Son bras était tendu, crispé, son doigt cherchant à attraper en vain ce livre. Attack on Titans, le nouveau manga qui faisait fureur, le tome trois, plus précisément. Il sentait les muscles de son bras se contracter, s'élevant de plus en plus haut, à croire qu'en plus de la pyrokinésie et du vol, le demi phénix maîtrisait aussi l'élasticité de son corps. Mais cette utopie s'arrêta avant même qu'il aie eu le temps d'en profiter, voyant s'écrouler sur sa tête toute la première rangée de mangas. Et merde. Et ce ne fut que quelques instants après que le reste s'écroula, les coins s'écrasant sur sa tête dans des grognements mécontents. D'un coup d'oeil rapide, il analysa les noms des mangas au sol. Ils n'étaient pas terribles, en plus. Une femme s'écria alors :
Non mais ça va pas ?! Vous auriez pu me tuer !
Je me retourne, levant un doigt pour m'expliquer, et lance :
Techniquement parlant, non. Vous ne pouvez pas mourir à cause de livres qui vous tombe sur la tête, la preuve, ça vient de m'arriver et je vous parle.
Il écarquilla les yeux, regardant son ventre.
... je crois ?
Il fut alors perplexe de sa capacité à être encore en vie, car si cette madame disait qu'elle aurait pu mourir, alors est-ce que lui qui avait été confronté à la situation dont elle parlait, était mort ? Il fronça les sourcils, vu qu'il était alors face un problème qui nécessitait... de l'intelligence. Il se pinça et découvrit qu'il était bien vivant. Il remit son attention sur la femme.
Oui, donc, après un petit problème technique par rapport à ma mortalité, je pense que nous pouvons revenir sur notre conversation d'origine. Allez-vous mourir à cause de mes mangas.
Il esquissa un léger sourire.  

Avalanche de livres

On aurait dit qu'elle ne pouvait s'empêcher de sourire, ce qui amusa un peu Isaiah. Elle continua ensuite, après quelques instants :
A vrai dire j'aurais pu être assommée, mal tomber, me briser les cervicales et, oui, mourir. Heureusement que j'ai des bons réflexes.
Le demi phénix haussa légèrement un sourcil, faisant un sourire en coin. C'était très peu probable vu qu'elle se tenait à quelques mètres de lui avant l'incident. Ainsi donc, selon la trajectoire habituelle et hasardeuse d'une chute d'un objet -donc d'un livre ou autre-, il était impossible qu'il tombe plusieurs mètres devant lui. Après avoir pensé ça en manquant de le dire à voix haute, Isaiah s'entendit dire :
Je ne pense pas que les réflexes aient quelque chose à faire avec ça... Puisque vous étiez deux mètres devant moi. Nous devons enquêter. Comme dans Mystère à Shanghai.
Mystère à Shangai, le film qu'il avait regardé il y a une semaine dans son bungalow, accompagné de popcorns et d'enfreintes au règlement du couvre-feu du camp. Il avait finit vers deux heures du matin, souriant et complètement lessivé. Voyant qu'elle ne connaissait apparement pas le film, il lança :
Mystère à Shanghai ! Voyons, le film de Roger Blanc... Ça ne vous dit rien ?
Après être passé à autre chose, celle dont il découvrait très tôt le nom déclara en lui tendant une main sûre et confiante :
Cassandre Fitzgerald !
Isaiah s'approcha donc d'un petit pas pour la lui serrer, moins confiant qu'elle :
Isaiah Mike.
C'était étrange de rencontrer des gens ainsi, dans des libraires. À New York, ce n'était pas ainsi normalement. Il y avait tant de mauvaises fréquentations que se présenter semblait trop risqué pour tenter le coup. Cette femme n'était pas très précautionneuse, un peu plus et toutes ses données personnelles auraient été retrouvées. Donner son nom et son prénom ainsi, pas une très bonne idée, pensa Isaiah. Le demi phénix se demanda si elle était une mortelle ou une demi-déesse, et puis se rappela. Les demis-dieux étaient très rares, surtout dans une ville avec une population si vaste que celle de New York. Les Dieux abusaient des fois, il devait bien y avoir 10 000 ou plus d'adultères dans le monde ! Ils étaient presque tous mariés, et pourtant. Aphrodite avait des enfants alors qu'elle était mariée à Héphaïstos, et lui aussi d'ailleurs ! Ou bien Zeus qui était supposé être uni à Héra. Dire qu'on reproche ensuite à cette dernière d'être colérique ! Vous m'étonnez aussi, son mari la trompe... Avec un petit soupir qu'il s'empêcha de pousser hors de son esprit, Isaiah replaça son attention sur la jeune femme.

Avalanche de livres

Isaiah fut étonné de voir que sa perplexité fut remarquée par la jeune femme qui semblait perturbée, voire même dérangée par l'expression du visage du demi phénix. Elle dit donc, à la surprise du jeune homme :
-Oh ! Il est presque midi, je devais rentrer pour 11 h 30 ! Bon bah tant pis pour les livres, je dois absolument y aller ! Au revoir, ce fut un plaisir !
Il hocha donc la tête, haussant les épaules et lui fit un signe de main :
Oh, d'accord. Bonne journée !
Il sourit légèrement, ne comprenant pas ce soudain intérêt à le fuir. Il la regarda partir, ouvrir la porte en verre de la librairie et s'en aller. Il haussa une autre fois les épaules, de toute façon ce n'était qu'une conversation sans intérêt. Il se baissa pour ramasser les mangas, puis les remit sur l'étagère, prenant au passage l'histoire d'Hokusaï en manga avec un sourire. Ça faisait longtemps qu'il le cherchait, et cet écroulement de livres fut donc utile pour le retrouver. Il le feuilleta puis passa en caisse. Dix euros pour ces deux ouvrages, ce n'était pas très cher compte tenu de la taille de ces derniers. Il sorti de sa poche l'argent et le déposa sur la table avant que le vendeur les prenne. Il imprima le reçu qu'Isaiah refusa pour ne pas que l'on repère sa petite escapade de l'après-midi. Il s'empara de son butin et s'envola vers les barrières de l'arbre de Thalia, quittant New York avec ses trésors dans la main.
En arrivant à la Colonie, il s'empressa d'aller dans son bungalow, pour ne pas que l'on remarque qu'il était sorti. Il déposa les mangas sur son lit, lisant les premières pages de Attack on Titans avant d'aller manger ses crêpes au jaunes d'oeufs à la table du repas.
«Miam...»
Et il ne repensa plus jamais à la « madame bizarre » comme il l'appela dans sa tête.