Matthew se réveilla en pleine nuit en sueur. Il avait fait un cauchemar. Rien de grave mais il ne se voyait pas redormir maintenant. Il jeta un coup d’œil à son réveil et aperçut qu’il n’était que trois heures du matin. Il poussa un soupir, il n’avait dormi que trois heures… Demain promettait d’être dur. Il balança ses pieds hors du lit, enfila un tee-shirt blanc et un jogging gris. Il se rendit dans la salle de bain. Il avait une tête de déterré. Voilà plusieurs nuits qu’il ne dormait pas bien et là, ça se faisait sentir. Il se passa un coup d’eau sur le visage et sortit discrètement du dortoir. Il descendit rapidement les escaliers ne faisant pas bruit. Il marcha dans le hall avec la ferme attention de sortir lorsqu’il entendit quelqu’un. Il se retourna et aperçut Sora. Sora était une amie à lui. Par ailleurs, il avait bien vu qu’elle n’avait pas l’air d’aller bien ces derniers jours. Elle marchait d’un pas décidé vers le niveau -1. Le niveau des prisons. Intrigué, Matthew la suivit sans faire de bruit et s’arrêta lorsqu’il l’entendit pleurer. Elle s’était laissé glisser le long du mur à côté d’une cellule vide. Quoi qu’elles étaient toutes vides donc bon… Il s’approcha doucement d’elle et s’assit à sa droite. Sans rien dire. Une fois que ses sanglots se furent taris, il lui demanda :

« Tu veux en parler ? »

Il s’aperçut qu’elle n’avait pas très bonne mine. Si lui avait l’air d’un mort, elle n’en valait pas mieux. Le fils d’Eris se demanda ce qui l’avait mise dans cet état. Elle le lui dirait, si elle en avait envie. Sinon, il resterait avec ses interrogations. Il la regarda. Il l’aimait bien et ne trouva pas juste qu’une fille comme elle finisse dans cet état tandis que d’autres fumiers comme les gens de la colonie vivait la vie en rose. Il attendit donc patiemment que Sora dise quelque chose.

Elle releva la tête vers lui, visiblement surprise. Elle essuya ses larmes d’un revers de manche et dit :

« Matthew ... Je suis désolée que tu me vois dans cette état, je suis tellement pathétique ! »

Elle se cacha derrière ses cheveux. On aurait dit qu’elle avait honte d’elle-même et cette vision serra le cœur à Matthew. Il la regarda un instant avant de s’adosser au mur de marbre de la froide prison. Il y avait plus joyeux comme endroit. D’un autre côté, l’austérité du lieu semblait bien convenir à la situation. Il frissonna ne sachant que faire. Il n’avait pas l’habitude de se retrouver dans cette situation. Il passait le plus clair de son temps avec Pandore qui… ne montrait pas beaucoup ses sentiments. Pas assez, en fait. Il chassa la fille de Zeus de son esprit. Elle occupait déjà suffisamment ses pensées pour ne pas en plus être là dans une prison…

Il se pencha vers Sora et dégagea doucement ses cheveux de son visage. Ce geste aurait pu être mal pris mais il n’y avait aucune arrière pensée. Il lui sourit gentiment en disant :

« Tu n’as pas à avoir honte… Moi aussi il m’arrive de pleurer ! Parfois, la vie… enfin les Parques peuvent se montrer cruelles et, il ne faut tout garder à l’intérieur sinon, tout explose. »

Il repensa à la fille d’Athéna qu’il avait agressé et où, tellement choqué par le plaisir qu’il y avait pris, avait pleuré jusqu’au petit matin. Puis il repensa au Matthew qu’il était avant qu’il ne sache qu’il était demi-dieu et que tout dérape, et là, à cet instant précis, il eut envie de pleurer. Il ajouta maladroitement :

« Tu sais, tu peux m’en parler… Enfin, je veux dire que je ne dirais rien si… enfin, je suis là, et tout le monde a besoin de quelqu’un qui soit là. »

"Merci, tu es vraiment quelqu'un de gentil, je t'avoue que je n'ai pas l'habitude de dire à quelqu'un ce que je ressens, c'est même le contraire ! J'ai érigé une carapace autour de mes sentiments mais il semblerait qu'elle se soit effritée comme du sable ..."

Elle cligna plusieurs fois des yeux tandis qu’il répondit :

«  Ne t’en fait pas, on ne peut pas être tout le temps de béton armé, ça arrive à tout le monde de craquer… Et puis, en tant que demi-dieu, on a le droit de craquer au moins dix fois plus qu’un mortel. »

Il regarda noué ses cheveux en chignon et le fils d’Eris lui trouva un air plus mature, bien qu’un peu austère. Elle lui demanda :

« Matthew, je me sens honteuse de te demander ça mais tu connais un remède contre les peines de coeur ? »

Le demi-dieu la regarda d’abord surpris. Il ne s’attendait pas à une peine de cœur mais au final, cela ne changeait rien au fait qu’elle soit très mal. Il se demanda de qui il pouvait bien s’agir mais se promit de ne pas poser la question pour ne pas manquer trop de tact. Elle continua :

«Comment fait-on pour arrêter de souffrir ? J'en ai assez de cette douleur qui me paralyse les côtes, j'ai l'impression de n'être bonne que pour me plaindre et pleurer à tout bout de champs.»

Il lui sourit gentiment en disant :

« Tu sais, pendant longtemps, j’étais amoureux de Pandore, mais ne lui dis pas, ça lui ferait trop plaisir, et je ne dirais pas que j’aie souffert autant que toi tu souffres aujourd’hui mais tu comprends, c’est ma meilleure amie et elle m’a bien fait comprendre qu’il ne se passerait jamais rien.  Alors, je suis resté son ami et j’ai pris sur moi. Puis je me suis dit que ça ne servait à rien de me morfondre et d’attendre alors je me suis… remis en selle. Sors, vois d’autres gens ! Fais en sorte de l’oublier ! Comprends que tu es une belle femme qui n’a pas besoin de lui pour s’amuser et que tu es mille fois mieux que lui ! Comprends qu’il ne te mérite pas ! »

Il la regarda.  Il aurait vraiment aimé croire à tout ce qu’il venait de dire mais la vérité était que les choses étaient devenues trop bizarre avec Pandore et que ça continuait à lui faire mal. Il espéra sincèrement que cela ne serait pas pareil avec Sora et son mystérieux amour.

Elle lui sourit gentiment.

« Je ... lui ai fait part de mes sentiments, il a été assez compatissant, il a été grand seigneur, même quand il me fait mal au plus haut point, je n'arrive pas à lui en vouloir. »

Matthew comprenait ce qu’elle ressentait. Etre incapable de décrocher, de se fâcher était le pire dans un amour à sens unique. D’un côté, elle voulait fuir cette douleur, mais d’un autre, elle s’y accrochait désespérément. Ce devait être horrible. Il lui jeta un regard compatissant.

« Il était mon meilleur ami, il l'est toujours d'ailleurs, j'aime beaucoup notre relation. J'ignore à quel moment mes sentiments pour lui ont changé, je suis vraiment triste que notre amitié soit ternie par ce je ne sais quoi d'amour. »

Plus elle lui racontait, plus il lui semblait qu’elle parlait de lui et Pandore. La ressemblance était frappante. Le fils d’Eris imaginait bien qu’elle genre de garçon il était. Genre héro parfait. Bel homme, gentil et attentionné. Du moins c’est ainsi que Matthew l’imaginait. La jeune fille essaya de se relever pour finalement se laisser glisser en face de lui, la mine défaite.

« Donc si je suis ton conseil, il faut que je trouve quelqu'un d'autre et que j'en tombe amoureuse ? C'est bien ça ? »

Matthew sourit. Pour résumer, c’était ça. Et fit ainsi, cela avait l’air tellement simple. Tellement évident. Pourtant, il n’était toujours pas parvenu à cette étape. Un moment, il l’avait cru avec Alesya mais… Il secoua légèrement la tête.

« Si ce quelqu'un doit exister, il devra être fou pour m'aimer, tu ne crois pas ? Un beau garçon mystérieux et intelligent qui devinerait mes pensées sans que je ne les formule, c'est utopique non ? »

Le demi-dieu la regarda. Il remarqua qu’elle était transie de froid alors puisqu’il avait l’impression de bouillir. Il enleva son sweet-shirt et lui tendit. Il se retrouva en tee-shirt mais, cela ne le dérangea pas. Il regarda Sora et répondit pensivement :

« Tu sais, si tu es amoureuse de lui, il aura beau être complètement taré, tu le trouveras parfait. C’est pas utopique, c’est simplement l’amour. Mais, tu n’es pas obligée de trouver le grand amour maintenant, tu peux sortir et t’amuser simplement. »

Il lui jeta un regard faussement sévère :

« Dans la limite du raisonnable, bien sûr, jeune fille. »

« Je ne te savais pas si vieux pour que tu me parles ainsi. Fais gaffe papy, tu risque de rouiller si on reste ici. D'ailleurs, où as-tu mis ton déambulateur ? »

Matthew la regarda et afficha une mine faussement vexée. Il croisa les bras en fronçant les sourcils. Elle rit et cela fit plaisir au fils d’Eris qui l’avait vu si défaite. Il aurait bien aimé entendre ce son plus souvent.

« Par rapport à toi, c’est vrai que je suis un papy. Ou alors, c’est toi qui es un bébé… Question de point de vue. »

Elle sourit et demanda :

« Et toi ? Tu es heureux ? Je veux dire, est-ce que tout va bien ? »

Le sourire enfantin sur le visage de Matthew s’estompa légèrement. Il toussota mal à l’aise.

« Tu peux tout me dire, je crois que ce soir, c'est confession. »

Le retournement de situation n’était pas vraiment prévu au programme. De toute manière, avec la tête qu’il tirait maintenant, pas la peine d’essayer de mentir. Il soupira. Avec sa tirade de tout à l’heure, il se voyait mal remettre le sujet de Pandore sur le tapis. Pourtant, tout était si compliqué. Pas qu’il soit amoureux d’elle (ou du moins, il avait décidé que non) mais elle était tellement changeante. Ces derniers temps, elle s’était montrée très froide avec lui. Depuis qu’il sortait avec Alesya, sa meilleure amie. Si Matthew n’avait pas mieux connu Pandore, il aurait dit qu’elle était jalouse. Mais, là, il était paumé. Il se contenta de répondre :

« Je sais pas trop… »

C’est vrai quoi, ça défiait toute logique. En fait, il s’aperçut qu’il était très en colère contre elle. Il lui en voulait de… lui en vouloir. Il avait bien compris qu’il n’avait aucune chance avec elle, alors pourquoi, à l’instant, où il passe à autre chose, elle lui fait payer ?

« Pandore est compliquée ces temps-ci… »

« Pandy ?! »

Elle avait l’air vraiment surprise. Voire même blessée. Il savait que les deux jeunes femmes étaient très proches du fait que Pandore avait prétendu être une fille d’Eole. Par conséquent, elles avaient même partagées un bungalow. Elle se sentait peut-être trahie. Pandore était quelqu’un de très secret, ou du moins, elle n’étalait pas ses sentiments. A la réflexion, lui-même ne l’avait quasiment jamais entendu parler d’elle. Tout ce qu’il savait, il l’avait déduit.  Elle enchaîna :

« Je veux bien croire que Pandy est compliquée, mais je ne pensais pas que tu ... avais des vues sur elle. Je pensais que tu étais avec quelqu'un d'autre ? J'aimerais savoir ce qui se passe entre ma sœur et toi. »

La voyant si désemparée, Matthew lui sourit gentiment. Il expliqua donc :

« Non, ce n’est pas ça du tout ! Techniquement, je n’ai plus de vues sur elle. Je sors avec Alesya. Ta sœur m’a bien fait comprendre que je n’avais aucune chance. Alors pourquoi, alors que je passe à autre chose, elle se comporte comme si j’avais commis la pire des horreurs ? Elle voudrait que je sois son chien jusque le restant de mes jours ?! »

En disant cela, je me rendis compte que j’étais assez en colère contre elle. Je lui en voulais mais bon tant pis… Il n’y avait qu’un moyen de régler ça, et c’était avec elle, pas en me plaignant. J’irais la voir dès que je pourrais. Plein de bonnes résolutions, il soupira :

« M’enfin, c’est pas trop grave, ça va se tasser… »

Enfin il l’espérait de tout son cœur, car Pandore était sa meilleure amie et il ne voulait pas la perdre pour une histoire stupide. Car oui, c’était très stupide cette histoire de fierté…

« Pandore tient à toi, elle a sûrement peur de te perdre, ça doit la frustrer et elle ne sait pas comment l'exprimer autrement que de crier ... sur toi ? »

Elle hausse les épaules comme si elle ne savait pas quoi dire d’autre. Pandore ne lui criait pas dessus. A la rigueur, ça ne l’aurait pas dérangé plus que ça, il a l’habitude. Mais elle se monstre distant avec lui et parfois, il a l’impression que c’est tendu entre Ales’ et elle. Il soupire et dit presque machinalement que ça allait se tasser. Mais en vrai, il n’en avait pas envie. Il voulait arrêter ce conflit ni queue ni tête mais pas que ça se tasse. Il voulait avoir des explications. Il n’en pouvait plus. Sora avait eu le même raisonnement car elle dit :

« Ecoute, je t'aime bien mais si tu as un problème avec elle, dis-lui ! Va la voir, engueule là mais ne laisse surtout pas les choses se tasser ! Tu es un grand garçon maintenant ! Alors affronte-là ! »

Elle se releva  pendant que le fils d’Eris hochait la tête. Elle le regarda de si haut que Matthew sourit, elle ressemblait à Pandore en cet instant, quand elle continua sur sa lancée :

« Il est temps de régler nos comptes. Toi comme moi avons perdu le contrôle de la situation, nous devons le retrouver »

Il se releva à son tour en souriant. Il lui dit :

« Tu as parfaitement raison ! Allez, la prochaine qu’on se voit, on a repris le contrôle ! Et surtout, on évite la prison, c’est un peu lugubre. »

Il lui sourit. La fatigue commençait à le gagner et quand il se dit qu’il n’avait plus que quelques heures à dormir, il poussa un petit soupir. Pourtant, il ne regrettait pas le moins du monde d’être venu. Ils avaient tous les deux faits un grand pas en avant. Ils remontèrent lentement les marches et l’air devient plus chaud. Lorsqu’ils durent se séparer, il la regarda et ajouta :

« N’oublies jamais que tu vaux dix fois mieux que ton inconnu, quel qui soit. Et que l’amour de ta vie ne sera pas forcément un héro parfait sur son cheval blanc. Que le principal est qu’il soit parfait pour toi. »

Il lui sourit une dernière fois et quelques minutes plus tard, il s’effondra sur son lit, déjà endormi.

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